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La crise semble favoriser le "partenariat stratégique birégional"
Bilan du VIe sommet Union européenne - Amérique latine et Caraïbes (UE-ALC)
MADRID, mercredi 19 mai 2010 (LatinReporters.com) - La crise économique
globale semble avoir favorisé l'ambition de consolider un "partenariat
stratégique birégional" réaffirmée par le VIe
sommet Union européenne - Amérique latine et Caraïbes
(UE-ALC). Madrid l'accueillait du 16 au 19 au mai, à six semaines
de la fin de la présidence tournante de l'UE assumée par l'Espagne.
Consignées dans la Déclaration de Madrid, les
percées commerciales sont notables. Cette déclaration finale ne reflète toutefois
pas "des questions plus imperceptibles, mais qui ne sont pas pour autant
moins importantes", estime la présidente argentine Cristina Fernandez
de Kirchner.
Egalement présidente en exercice du Mercosur, zone économique
composée du Brésil, de l'Argentine, du Paraguay et de l'Uruguay
(le Venezuela est en phase de préadhésion), Mme Kirchner fut devant les médias
la voix dominante des 33 pays de l'ALC. Et cela malgré la
présence du puissant et respecté président brésilien Luiz Inacio Lula
da Silva, lequel, il est vrai, ne parle pas l'espagnol.
"Pour la première fois, lorsque nous discutons de certaines questions,
je vois que n'existent plus [du côté européen] les positions
ultramontaines constatées auparavant lorsque nous abordions ces questions
sous un point de vue différent [de celui de l'UE]" expliquait la présidente argentine,
le 18 mai lors de la conférence de presse suivant la réunion
plénière des chefs d'Etat ou de gouvernement.
"Il fallait bien trouver un aspect positif à la crise" poursuivait
Mme Kirchner, attribuant à la dépression économique
et financière globale l'attitude "plus sensible" et "plus flexible"
qu'elle décèle désormais chez les représentants
du Vieux Continent. Elle relevait par ailleurs, dénonçant le "capitalisme
spéculatif" dans une interview diffusée le 19 mai par la télévision
publique espagnole, qu'à la veille de la quasi banqueroute actuelle
de la Grèce, ce pays était curieusement mieux classé
que l'Argentine par les agences de notation financière.
C'est de fait une Europe en crise, donc d'autant plus désireuse de
développer ses marchés extérieurs, qui s'est assise
à Madrid aux côtés d'une Amérique latine résistant
relativement bien jusqu'à présent à la crise planétaire.
Les deux interlocuteurs se sont tutoyés sans complexes ni fausse politesse.
Alan Garcia, président d'un Pérou devenu le champion américain
de la croissance, s'est même payé le luxe d'exprimer sa "solidarité"
avec la Grèce et l'Espagne. Ces pays soumis à l'austérité
"ont le courage d'affronter des circonstances difficiles" à l'heure
où "la crise secoue l'Europe dont on croyait la force inébranlable"
a ajouté Alan Garcia. Il a présenté aux investisseurs
européens le Pérou comme une valeur refuge. Le président
colombien Alvaro Uribe et son homologue mexicain, Felipe Calderon, avaient
déjà fait de même.
Trois avancées commerciales importantes ont été
favorisées par ce climat au sommet de Madrid :
1. Signature d'un accord de libre-échange entre l'UE et la
Colombie et le Pérou. Cet accord demeure théoriquement ouvert
aux deux autres pays de la Communauté andine, Bolivie et Equateur,
opposés jusqu'à présent à l'ouverture de certains
secteurs de leur économie. Le président socialiste bolivien,
l'Amérindien Evo Morales, est même ouvertement hostile à
la philosophie de l'économie de marché.
2. Signature d'un accord d'association, comprenant un large volet commercial
de libre-échange, par l'UE et l'Amérique centrale (Costa Rica,
Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua et Panama).
3. Décision de relancer dès la première semaine
de juillet les négociations en vue d'un accord d'association entre
l'UE et le Mercosur. Ouvertes en 1999, mais paralysées depuis 2004,
ces négociations portent aussi surtout sur le libre-échange.
L'accord d'association éventuel unirait les 500 millions d'Européens
communautaires et les quelque 250 millions de Sud-Américains des 4
pays de l'actuel Mercosur. Ce marché commun du Sud engloberait près
de 280 millions d'habitants si l'adhésion du Venezuela se concrétisait.
Remarques
Avant l'ouverture du VIe sommet UE-ALC, la France faisait savoir que dans l'attente de la conclusion des négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce (cycle dit de Doha), "l'Union
européenne ne peut mener [en l'occurrence avec le Mercosur; ndlr]
des négociations qui risquent de remettre en cause l'agriculture française
et européenne". Cette position est partagée par les ministres
de l'Agriculture d'au moins neuf autres pays de l'UE (Autriche, Finlande,
Grèce, Hongrie, Irlande, Pologne, Luxembourg, Roumanie et Chypre).
Interrogé en conférence de presse sur cette contestation,
José Luis Rodriguez Zapatero, chef du gouvernement socialiste espagnol
et président ce semestre de l'UE, a répondu qu'une "immense
majorité des pays de l'UE est en faveur de cette relance avec le Mercosur",
qui pourrait déboucher sur "le plus important accord de libre-commerce
signé par l'UE". Des analystes estiment que, malgré une solidarité
apparente avec les ministres de l'Agriculture, des gouvernements européens
miseraient sur les avantages en matière de produits industriels et
de services qui découleraient d'une association avec le Mercosur.
M. Zapatero admet néanmoins que les négociations seront "longues
et difficiles".
L'Union européenne a désormais des accords commerciaux ou de partenariat en
vigueur ou en négociation avec tous les pays d'Amérique latine,
à l'exception du Venezuela, de Cuba, de la Bolivie et de l'Equateur, quatre pays gouvernés aujourd'hui par une gauche radicale.
L'UE avait à Madrid une représentation institutionnelle
incarnée de vive voix dans quasi toutes les conférences de
presse par l'Espagnol José Luis Rodriguez Zapatero, le Belge
Herman Van Rompuy (président stable du Conseil de l'UE) et le Portugais
José Manuel Durao Barroso (président de la Commission européenne).
Par contre, la représentation institutionnelle était inexistante pour l'Amérique
latine considérée dans son ensemble. L'Argentine Cristina Fernandez
de Kirchner est certes présidente en exercice du Mercosur (4 pays), mais ni
l'Unasur (Union des nations sud-américaines; 12 pays) ni moins encore
l'incorporelle Communauté des Etats d'Amérique latine et des
Caraïbes, esquissée en février dernier au Mexique par les 33 chefs
d'Etat de l'ALC, n'ont été identifiables au sommet de Madrid.
Vingt-six des 60 chefs d'Etat ou de gouvernement invités au sommet
y étaient remplacés par un vice-président
ou un ministre. L'absence peu expliquée du bouillant président
vénézuélien Hugo Chavez a contribué au climat
de coopération entre l'UE et les pays de l'ALC.
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Mercosur - UE
LA FRANCE CONFIRME SON OPPOSITION À LA REPRISE DES NÉGOCIATIONS
PARIS, jeudi 20 mai 2010 (LatinReporters.com) - Le ministre de l'Agriculture
français, Bruno Le Maire, a confirmé le 20 mai au Sénat
l'opposition de la France à la reprise, décidée deux jours plus tôt au VIe
sommet UE-ALC (voir article ci-contre), des négociations en vue d'un accord d'association
entre l'Union européenne et le Mercosur (marché commun sud-américain
formé par le Brésil, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay).
Selon le ministre, 15 des 27 pays de l'Union européenne s'opposent
désormais à cette reprise.
Transcription de l'intervention du ministre Bruno Le Maire, qui répondait à la
question d'un sénateur:
"La position du gouvernement français, sous l'autorité de François Fillon,
est claire : nous sommes opposés à la reprise des négociations commerciales
entre l'Union européenne et le MERCOSUR.
Nous y sommes opposés parce que les exportations de produits agricoles,
notamment de viande, en provenance des pays du MERCOSUR et à destination
de l'Union européenne ont doublé en l'espace de cinq ans.
Nous y sommes opposés parce que, au moment même où l'Union
européenne acceptait des importations supplémentaires de biens
agricoles en provenance du MERCOSUR, certains pays de cet ensemble augmentaient
leurs droits de douane sur les produits alimentaires en provenance de l'Union
européenne.
Enfin, nous y sommes opposés parce qu'il n'y a aucune raison pour
que l'Union européenne signe des accords avec le MERCOSUR avant que
les négociations commerciales au sein de l'OMC soient conclues.
C'est la raison pour laquelle, sous l'autorité du président
de la République et du Premier ministre, nous avons défendu
cette position, au Conseil européen comme au Conseil des ministres
de l'Agriculture.
Voilà encore trois semaines, seuls deux pays, dont la France, étaient
sur cette ligne. Lors du Conseil des ministres de l'agriculture qui s'est
tenu lundi dernier à Bruxelles, il y en avait dix. Désormais,
parmi les pays membres de l'Union européenne, nous sommes quinze à
nous opposer à la reprise des négociations avec le MERCOSUR.
J'ai entendu les responsables d'un certain nombre de pays européens
se féliciter de ce que la reprise de ces négociations entre
l'Union européenne et le MERCOSUR puisse, dans un futur proche, bénéficier
aux pays de cette zone. J'aimerais que l'Union européenne, avant de
se préoccuper des intérêts des pays du MERCOSUR, se soucie
de ceux de ses agriculteurs et de ses citoyens.
J'aimerais que la production agricole cesse d'être systématiquement
la variable d'ajustement des négociations commerciales en Europe."
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