MADRID, dimanche 9 mai 2010 (LatinReporters.com) - "Ce n'est pas un cancer
du poumon", mais "une tumeur bénigne", extirpée avec succès,
précisait samedi en début d'après-midi le chirurgien
Laureano Molins à la foule de journalistes dépêchés
à l'hôpital Clínic de Barcelone. Le roi Juan Carlos d'Espagne,
72 ans, y avait été opéré le matin. Le pays s'est
alarmé. On a prononcé le mot "régence", mais seulement
pour démentir la nécessité d'y recourir.
Les communiqués officiels, dont celui de la Maison royale, évitent,
eux, de parler de "tumeur". Ils soulignent que l'opération a libéré
le souverain d'un "nodule" pulmonaire, une lésion non maligne au
poumon droit. Ce nodule, détecté dès 2007 par les médecins
qui le jugeaient alors insignifiant, avait pris soudain des proportions inquiétantes,
19 millimètres de long sur 12 de large. Un bilan de santé annuel
le révéla le 28 avril. Résultat ou non de cette évolution,
nul ne le précise, Juan Carlos Ier semblait souvent fatigué
et préoccupé depuis plusieurs mois.
Opéré trois heures et demie durant sous anesthésie totale,
le chef de l'Etat, désormais convalescent, ne devra subir ni radiothérapie
ni chimiothérapie. Il pourra quitter l'hôpital "dans trois ou
quatre jours" et reprendre dans le délai de quinze jours une activité
"non physique", un travail de bureau, a expliqué à la presse
le chirurgien Molins. Radio-télévisé en direct, ce praticien renommé a
soulevé les rires en précisant que la fonction royale est de
toute façon physiquement moins exigeante que celle de "débardeur".
Laureano Molins a dit encore avoir recommandé à son illustre
patient de ne plus fumer, car le tabac provoque 95% des tumeurs pulmonaires
malignes, celle du roi n'étant heureusement pas de cette catégorie.
"Je me sens bien, heureuse, maintenant que tout est passé" confiait,
très souriante, la reine Sofia aux journalistes. Venue au chevet de
son mari, elle lui a attribué "une santé impressionnante".
L'infante Elena visitait son père dans l'après-midi. L'autre
fille du roi, l'infante Cristina, est attendue lundi en provenance de Washington,
où elle réside, Quant au prince héritier Felipe, il
n'a pas écourté sa visite au Costa Rica, Il y assistait samedi
à l'investiture de Laura Chinchilla, première femme présidente
du plus stable des pays d'Amérique centrale.
L'alarme semble donc avoir été brève. Il n'empêche
qu'aussitôt avertis de l'hospitalisation du souverain, le président
du gouvernement, le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, le chef
de l'opposition conservatrice, Mariano Rajoy, et le président du Congrès
des députés, José Bono, sont demeurés mobilisés
jusqu'à l'annonce de l'issue heureuse de l'intervention chirurgicale.
"Les choses se sont bien déroulées.
On sait qu'il [le roi] est fort et nous sommes très tranquilles, comme
nous l'espérions" a commenté samedi à Madrid M. Zapatero.
A ses côtés, le vice-président des Etats-Unis, Joe Biden,
exprimait "sa grande tendresse" pour le souverain. Le roi l'avait reçu
la veille dans la capitale, à 600 km de Barcelone, sans lui parler
de son imminente hospitalisation dans la métropole catalane.
Le conservateur Mariano Rajoy a déclaré, lui, que "nous sommes,
comme toujours, avec lui [le roi] et avec la monarchie, convaincus que sa
récupération sera bonne et nous souhaitons avec ferveur qu'il
en soit ainsi".
"Abdiquer? Jamais!"
La Maison royale et le gouvernement avaient rejeté d'emblée
l'application de l'article 59 de la Constitution. Son point 2 stipule : "Si
le Roi est inhabile à exercer son autorité et que cette incapacité
est reconnue par les Cortès générales [Parlement; ndlr],
le Prince héritier de la Couronne, s'il est majeur, exercera immédiatement
la Régence".
Majeur, le prince héritier Felipe l'est évidemment à
42 ans et une prétendue impatience à monter sur le trône,
non perceptible par le commun des mortels, lui est parfois attribuée
par des journalistes espagnols. Certains imputent la même impatience
supposée à l'épouse du prince, l'ex-journaliste de télévision
Letizia Ortiz, aujourd'hui princesse des Asturies.
Il y a un an et demi déjà, la reine Sofia tentait de mettre
le holà à pareilles spéculations. Lors de conversations
avec Pilar Urbano, reproduites en octobre 2008 par cette journaliste dans
le livre intitulé "La Reina, muy de cerca" (La Reine, de très
près), la souveraine affirmait : "Ni le roi n'est fatigué ni
le prince n'est impatient ... Abdiquer? Jamais! Le roi n'abdiquera jamais.
Nous n'en parlons jamais. Cela sous-entend qu'il régnera jusqu'à
la mort".
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