|
Blocage de la ZLEA-ALCA par le Brésil, l'Argentine et le Venezuela: un revers pour le président Bush
L'échec du IVe Sommet des Amériques divise le continent
|
Mar del Plata: les présidents américain George W. Bush (1er plan) et argentin Nestor Kirchner séparés par la ZLEA Photo Cancillería de Argentina |
BUENOS AIRES, lundi 7 novembre 2005 (LatinReporters.com) - La Zone de libre-échange
des Amériques (ZLEA; en espagnol ALCA) reste au congélateur
après le IVe Sommet des Amériques, réuni les 4 et 5
novembre à Mar del Plata, en Argentine. Cet échec du président
américain George W. Bush divise le continent en deux blocs.
Dominé médiatiquement par la présence du chef d'Etat
américain et de son adversaire idéologique vénézuélien,
Hugo Chavez, le sommet réunissait 32 présidents et 2 vice-présidents
représentant tous les pays des Amériques, à la seule
exception de Cuba, considérée comme une dictature et exclue
à ce titre de l'Organisation des Etats américains.
Cinq pays, les 4 du Mercosur (marché commun sud-américain formé
par le Brésil, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay) et le Venezuela,
qui devrait s'intégrer au Mercosur en décembre, se sont opposés
à la relance de la ZLEA. Le PIB (produit intérieur brut) total
de ce groupe de contestataires est d'environ 1.000 milliards de dollars (906 milliards en 2004).
Les 29 autres pays -dont les Etats-Unis, le Canada, le Mexique, la Colombie,
le Chili, ceux d'Amérique centrale, etc.- veulent aller de l'avant
dans le libre-échange continental sur les bases actuelles. Le PIB
global de ce bloc majoritaire s'élève à 14.500 milliards
de dollars, 15 fois celui des cinq pays qui freinent la ZLEA.
Les Etats-Unis, alors présidés par Bill Clinton, avaient mis
sur les rails le projet de ZLEA dès 1994, au Ier Sommet des Amériques
tenu à Miami. De l'Alaska à la Terre de Feu et surpassant largement,
avec 800 millions d'habitants, la population de l'Union européenne,
la ZLEA serait théoriquement la plus importante zone commerciale de
la planète.
Lors de sa première année de présidence, en 2001, George
W. Bush avait situé la ZLEA dans une vision désignant le 21e
siècle comme "le siècle des Amériques". Une vision obscurcie
quelques mois plus tard par les attentats islamistes du 11 septembre, suivis
de l'invasion de l'Afghanistan et de la guerre en Irak, qui a attisé
l'antiaméricanisme toujours à fleur de peau en Amérique
latine.
La ZLEA n'était théoriquement pas à l'agenda du IVe
Sommet des Amériques. Officiellement, à Mar del Plata, les
chefs d'Etat devaient se pencher sur le thème "Créer du travail
pour combattre la pauvreté et renforcer la gouvernance démocratique".
Mais avant même d'atterrir en Argentine, le président Bush affirmait
à la presse qu'il y défendrait le libre-échange, car,
précisait-il, "contre la pauvreté, les crédits et les
dons sont de pâles remèdes en comparaison du bien que le développement
du commerce peut faire à tous les niveaux de la société".
Remettre la ZLEA sur le tapis était donc inévitable. L'un de
ses partisans, le président mexicain Vicente Fox, s'en est chargé.
Pour la première fois en 11 ans d'histoire de Sommets des Amériques,
les 34 pays participants ont été incapables de trouver un consensus
faisant progresser le libre-échange continental.
Le communiqué final du sommet de Mar del Plata officialise l'échec. Son point nº 19
renvoie "l'exploration" des désaccords sur la ZLEA-ALCA à une "réunion de responsables
de négociations commerciales" qui serait convoquée à
une date indéterminée et qui tiendrait compte "des résultats
de la prochaine réunion ministérielle de l'Organisation mondiale
du Commerce (OMC)", du 13 au 18 décembre prochains à Hong-Kong.
Seul le Venezuela du président Chavez a déjà décrété
la mort de la ZLEA. Hugo Chavez prône avec Cuba une alternative continentale
socialiste dénommée ALBA (Alternative bolivarienne pour les
Amériques). Ce défi aux ambitions de Washington repose sur
l'abondance du pétrole vénézuélien..
Le Brésil, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay n'excluent pas, eux,
d'adoucir leur blocage de la ZLEA. Une éventuelle réduction
significative, dans le cadre de l'OMC, des subventions octroyées par
les pays développés à leurs agriculteurs pourrait faciliter
l'accès au marché nord-américain des pays du Mercosur,
grands producteurs agricoles. Un obstacle de taille à la relance de
la ZLEA serait alors levé. Le président brésilien Luiz
Inacio Lula da Silva l'a dit au président Bush.
En cas de maintien durable de la division en deux blocs enregistrée
à Mar del Plata, la ZLEA pourrait être lancée, comme
l'a suggéré le Mexique, par les 29 pays qui en sont partisans.
Le libre-échange entre les Etats-Unis, le Mexique et le Canada est
déjà une réalité. Le libre commerce unit aussi
les Etats-Unis au Chili et, bientôt, début 2006, aux pays d'Amérique
centrale. Washington négocie encore des accords semblables avec la
Colombie, l'Equateur, le Pérou et la Bolivie.
Les 11 ou 12 élections présidentielles prévues en Amérique
latine d'ici la fin de 2006 créent une incertitude de taille. Elles
pourraient accentuer le virage latino-américain à gauche, notamment
au Nicaragua, au Mexique et en Bolivie.
Proche de Fidel Castro et de Hugo Chavez, le leader indigène bolivien
Evo Morales est en tête des sondages. Or, la Bolivie détient
les plus importantes réserves de gaz naturel d'Amérique du
Sud après celles du Venezuela. Plus que l'idéologie, le déficit
énergétique d'autres pays sud-américains risquerait
de les faire glisser vers l'ALBA bolivarienne renforcée par un axe
gazo-pétrolier La Paz-Caracas.
Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
ARTICLES ET DOSSIERS LIÉS
Dossier Globalisation
Tous les titres
|
|