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Le président colombien Alvaro Uribe souffle le chaud et le froid
Colombie / Betancourt : flop-Farc du sommet Chavez-Sarkozy. Et maintenant?
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Hugo Chavez (à droite) reçu par Nicolas Sarkozy le 20 novembre 2007 à Paris: cordialité mesurée et pas de conférence de presse commune.
Photo Francisco Batista - Prensa Presidencial | |
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BOGOTA / PARIS, mercredi 21 novembre 2007 (LatinReporters.com)
- En terme de théâtre, deux grands acteurs-présidents,
le Vénézuélien Hugo Chavez et le Français Nicolas
Sarkozy, ont conclu leur sommet du 20 novembre à Paris sur un flop-Farc,
un flop médiatique dû aux FARC. Cette guérilla n'a pas
honoré sa promesse quant aux preuves de vie d'Ingrid Betancourt et
d'autres de ses otages. Sur leur sort, incertitude et espoir se mêlent.
Médiateur depuis trois mois entre Bogota et la vieille insurrection
marxiste des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie)
pour faciliter un échange humanitaire de prisonniers entre les deux
camps, Hugo Chavez avait annoncé qu'il présenterait en France
un gage de vie d'Ingrid Betancourt. La Franco-Colombienne est séquestrée
par les FARC depuis le 23 février 2002. Nicolas Sarkozy a fait de
sa libération une priorité de son mandat.
Mais Chavez, très attendu, a atterri à Paris les mains vides.
Les FARC, qui admirent pourtant son socialisme bolivarien, ne lui ont pas
fourni la preuve de vie promise. Le Vénézuélien n'a
présenté qu'une lettre attribuée au patriarche Manuel
Marulanda -invisible depuis 2002, mais chef suprême présumé
de la guérilla- affirmant que les doutes seraient dissipés
avant la fin de l'année.
Du coup, pas de conférence de presse commune Chavez-Sarkozy. A peine
une brève déclaration du porte-parole de l'Elysée, David
Martinon, prenant "note des assurances données par les FARC que
des preuves de vie des otages seraient rapidement fournies, tout en regrettant
que ces nouvelles promesses n'aient pas encore été suivies
d'effet". La même déclaration précise que "ces
preuves de vie étaient indispensables [l'imparfait souligne l'actuelle
déception; ndlr], à la fois pour être
rassurés sur le sort des otages et pour s'assurer de la sincérité
des FARC à rechercher une solution humanitaire".
Chavez a engrangé sa photo avec Nicolas Sarkozy. Un vernis international
additionnel peut-être utile avant le référendum du 2
décembre sur la réforme qui enracinerait le socialisme bolivarien
dans la Constitution vénézuélienne jusqu'à présent
pluraliste.
Un impair inattendu (calculé pour compenser les mains vides?) du président
Chavez, révélant partiellement à Paris des aspects réservés
de ses contacts avec son homologue colombien Alvaro Uribe, a toutefois ouvert
des perspectives nouvelles dans le dossier de l'échange humanitaire.
Pour situer la portée exacte de propos inattendus d'Hugo Chavez attribuant
à Alvaro Uribe une soudaine disposition à accepter, voire à
participer à des négociations qui réuniraient en Colombie
même le président vénézuélien et le chef
des FARC, la présidence colombienne a émis les 19 et 20 novembre deux
communiqués successifs lus par le Haut commissaire pour la paix, Luis Carlos Restrepo.
Le second de ces communiqués dit notamment:
"Si les FARC libèrent unilatéralement un groupe de séquestrés
en son pouvoir, avec l'engagement de les libérer tous, y compris les
trois Nord-Américains, le président Hugo Chavez sera autorisé
à tenir une réunion avec Manuel Marulanda en un lieu du Caguan
[région du Sud colombien], selon des règles claires et avec
un accompagnement international. Cette réunion se réaliserait
sous l'engagement d'ouvrir un processus de paix. Le président Alvaro
Uribe a manifesté sa disposition à se rendre à une rencontre
similaire, moyennant la libération préalable de tous les séquestrés
et dans le cadre d'un processus de paix réussi".
Autoriser, fût-ce conditionnellement, un chef d'Etat étranger,
Hugo Chavez, à négocier sur le sol colombien avec le leader
de guérilleros insurgés contre Bogota depuis 1964 signifie
que le conservateur Alvaro Uribe peut souffler le chaud. Sans aller toutefois
jusqu'à admettre la démilitarisation unilatérale d'une
zone concrète de négociation comme l'exige la guérilla.
Date limite de la médiation d'Hugo Chavez
Le premier communiqué présidentiel colombien soufflait par
contre le froid avec cet avertissement: "Le président Uribe a dit
au président Chavez que ce processus de médiation doit avoir
une limite dans le temps, point sur lequel le président Chavez marqua
son accord. Le gouvernement [colombien] pense aujourd'hui que la limite doit
être le mois de décembre".
La guérilla des FARC est ainsi priée de prouver avant le 31
décembre qu'elle peut aussi faire un geste en faveur de l'échange
humanitaire de prisonniers et, au-delà, de la paix en Colombie. Dans
le cas contraire, le mandat de médiateur confié fin août par Alvaro
Uribe à Hugo Chavez serait peut-être révoqué.
Une preuve de vie d'Ingrid Betancourt et d'autres otages reporterait-elle
cette menace? La fournir, comme promis, comporte le risque de permettre la
localisation des otages par l'armée prétend la guérilla
pour justifier son retard. Mais même un proche des FARC tel que Carlos
Lozano, directeur du quotidien communiste colombien Voz, se demande "pourquoi
une lettre [de Manuel Marulanda exhibée par Chavez à Paris]
peut arriver, mais non les preuves [de vie]?"
"Pourquoi les FARC ne donnent pas ces preuves de vie alors qu'ils ont
réussi à traverser la jungle pour se rendre à Caracas"
s'étonne de la même façon l'ex-mari d'Ingrid Betancourt,
Fabrice Delloye, en référence aux entretiens du commandant
des FARC Ivan Marquez avec Hugo Chavez, le 8 novembre dernier au palais présidentiel de la capitale vénézuélienne. Le show médiatique entourant cette rencontre a choqué de nombreux Colombiens et a contribué au souhait de Bogota de limiter la durée de la médiation d'Hugo Chavez.
Ingrid Betancourt étant le plus net symbole des otages des FARC, c'est
en pensant à elle, apparue pour la dernière fois sur une vidéo
diffusée le 30 août 2003, qu'on est tenté de répondre
aux "pourquoi?" inquiets.
Est-elle morte? Est-elle souffrante et les guérilleros, craignant
de renforcer leur image de bourreaux, hésitent-ils à diffuser l'image d'une
femme chétive? Ou alors, incarnant une dignité rare parmi les
otages et parmi des familles qui espèrent les récupérer
en assumant parfois des arguments des terroristes, Ingrid Betancourt se refuse-t-elle
à n'être qu'une complice forcée du chantage des FARC
sur une vidéo larmoyante? L'étonnante force de caractère
et la hauteur d'esprit qu'elle affichait en 2003 sur sa dernière
vidéo tournée par les FARC peut faire pencher, l'optimisme
aidant, pour cette dernière hypothèse.
Enfin, si vraiment l'échange humanitaire de prisonniers -limité
dans sa conception actuelle à 45 otages dits "politiques" des FARC
contre quelque 500 guérilleros emprisonnés- était une
priorité des rebelles, cet échange pourrait avoir lieu ce soir
ou demain. Le problème est que la guérilla utilise le chantage
des otages pour tenter d'amasser un butin politique, à savoir être
rayée des listes internationales d'organisations terroristes, être
reconnue comme partie belligérante et, dans la foulée, comme
interlocuteur politique par des capitales qui accepteraient l'ouverture d'une
représentation permanente des FARC.
Des prétentions qui risquent d'être perçues comme excessives
tant que ne seront pas libérés, comme le souhaite le président
Uribe, tous les séquestrés. Des centaines de civils enlevés
par les FARC, y compris femmes et enfants, croupissent dans la jungle. Ces
otages "économiques", inconnus des médias, ne sont rendus
que contre rançon. Quant à la lutte armée, tant l'influente
gauche colombienne du PDA (Polo Democratico Alternativo) qu'Hugo Chavez
et son allié et homologue bolivien Evo Morales tentent de convaincre
les FARC que la violence meurtrière est aujourd'hui moins payante que la mobilisation politique
pour conquérir le pouvoir.
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