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Les séparatistes avertissent que leur cessez-le-feu n'est pas "irréversible"
Espagne - Pays basque: l'ETA insiste sur l'autodétermination et la "territorialité"
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Trois membres de l'ETA annonçaient le 22 mars 2006 à la TV basque un cessez-le-feu permanent - VidéoPhoto ETB |
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MADRID, dimanche 14 mai 2006 (LatinReporters.com ) - La clef de la paix est le respect par l'Espagne et la France
de ce que les Basques décideront à propos de l'exercice du
droit à l'autodétermination sur tout le territoire de l'Euskal
Herria (Patrie basque) affirment dimanche deux membres de l'ETA au journal
basque Gara. Les séparatistes avertissent que leur cessez-le-feu n'est
pas "irréversible".
Leurs déclarations et revendications contredisent l'approche du président du
gouvernement espagnol, le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero, qui dit refuser toute
concession politique dans un processus de paix.
C'est la première fois que l'ETA s'exprime publiquement depuis l'annonce,
le 22 mars dernier, de son "cessez-le-feu permanent". Proche des indépendantistes,
le quotidien Gara publie régulièrement leurs communiqués. L'interview de ce
dimanche est réalisée par le rédacteur en chef du journal, Josu Juaristi, ce qui
atteste la représentativité de ses interlocuteurs, dont les noms ne sont pas
cités.
L'organisation séparatiste, dont les attentats ont fait plus de 800
morts et des milliers de blessés depuis 1968, estime dans l'interview que le cessez-le-feu
est son principal apport au processus de paix et que la balle serait désormais
dans le camp de l'Espagne et de la France, considérée par les indépendantistes
comme partie au conflit. Les deux pays sont invités à mettre fin à
la "répression".
L'ETA dit qu'elle mise sur un "processus démocratique". Cela signifie mobiliser
les forces sociales et politiques de la Patrie basque pour élaborer
un accord global définissant un futur axé sur "la territorialité
et l'autodétermination". Pas question d'une simple "normalisation
politique", précise l'ETA, qui rejette toujours ainsi le cadre constitutionnel
espagnol.
La "territorialité" dont elle parle étend la Patrie basque à la Navarre et au Pays
basque français. Causes de l'échec des tentatives précédentes de
négociation avec l'ETA, autodétermination et territorialité sont
réclamées depuis près de quarante ans par les séparatistes. Organisés d'abord
en représailles à la dictature franquiste, leurs attentats -aucun n'a été
mortel depuis trois ans- visèrent ensuite à forcer une négociation sur ces deux
revendications permanentes.
"Il revient à la France et à l'Espagne de respecter les résultats
de notre processus démocratique... Le cadre de négociation
de l'ETA se développera en fonction de ce point de départ...
L'autodétermination et la territorialité sont les clefs pour
surpasser un conflit qui dure depuis tant d'années" insistent les
indépendantistes dans leur interview à Gara.
Ce n'est qu'ensuite que l'ETA accepterait de parler avec Madrid et Paris
de "démilitarisation".
Les séparatistes affirment que "le processus de résolution
du conflit" doit inclure "l'amnistie et la libération des prisonniers"
(quelques 700 "Etarras" sont emprisonnés, dont un quart en France).
"Aujourd'hui même" ajoutent-ils, la France et l'Espagne devraient "reconnaître
leur statut politique" et mettre fin à leur dispersion. (Le regroupement des détenus
dans des prisons basques ou proches du Pays basque est revendiqué
également par les nationalistes modérés).
Défiant l'exigence de la fin de toute violence, y compris l'extorsion
économique appelée impôt révolutionnaire, posée
comme condition par M. Zapatero et par le Parlement espagnol à une
négociation avec l'ETA, les indépendantistes justifient cette extorsion, car "la lutte de
libération continue aujourd'hui et elle entraîne des nécessités,
y compris économiques".
Selon les deux interlocuteurs de Gara, "ceux qui se limitent à tenter
(en parlant de paix) de désactiver la lutte armée de l'ETA
se trompent... S'ils veulent rendre irréversibles les décisions
de l'ETA sans développer le moindre processus démocratique,
nous devons leur dire qu'ils sont totalement dans l'erreur".
Le "cessez-le-feu permanent" décrété par l'ETA le 22
mars n'est donc pas "irréversible". Un paradoxe qui ne devrait pas
empêcher M. Zapatero de solliciter du Parlement, probablement en juin,
l'ouverture d'un dialogue formel avec les séparatistes. Des proches du dirigeant socialiste
suggèrent que l'ETA chercherait surtout, par ses nouvelles déclarations, à
maintenir la cohésion de ses sympathisants.
L'Etat (espagnol) "ne commente pas les communiqués
de l'ETA", a déclaré la vice-présidente du
gouvernement, Maria Teresa Fernandez de la Vega, en réaction à
l'interview publiée par Gara. M. Zapatero avait pourtant consacré des interviews
entières à analyser avec satisfaction et prudence les perspectives ouvertes par
l'annonce du cessez-le-feu de l'ETA.
La vice-présidente juge que le "plus important" est
que les rapports des services de sécurité confirment jusqu'à
présent le respect du cessez-le-feu.
Selon le porte-parole du groupe socialiste au Congrès des députés,
Diego Lopez Garrido, l'essentiel "n'est pas ce que dit, mais ce que fait" l'ETA.
Enfin, le porte-parole du Parti populaire (opposition conservatrice) au Parlement
basque, Leopoldo Barredo, prie le gouvernement de "désarticuler la
bande terroriste", qui cherche à "s'imposer à la société
démocratique".
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