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Terrorisme et souverainisme basques contre Zapatero
Espagne - Attentat de l'ETA à l'explosif: garde civil tué, 4 blessés
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"L'ETA tue un garde civil avec une voiture piégée en Alava" titrait quelques heures après l'attentat le portail Internet du quotidien espagnol El Pais sous une photo de la caserne de Legutiano. L'un de ses flancs a été soufflé par l'explosion. |
MADRID, mercredi 14 mai 2008 (LatinReporters.com) -
Un tué et 4 blessés, dont deux femmes, tous agents de la garde civile. Leur
caserne-résidence de Legutiano, dans la province basque d'Alava, a été
partiellement soufflée le 14 mai à 3h du matin par l'explosion d'une fourgonnette
piégée. "La bande terroriste ETA voulait un massacre" affirme
le ministre de l'Intérieur, attribuant comme toute l'Espagne l'attentat
non encore revendiqué à l'organisation séparatiste basque.
Le ministre, Alfredo Perez Rubalcaba, précise que la caserne-résidence
abritait cette nuit-là 29 personnes, dont 5 enfants en bas âge
et une adolescente de 18 ans. Il en déduit que "l'ETA a fait un pas
de plus pour se distancier de toute personne de bonne volonté".
Le garde civil Juan Manuel Piñuel, 41 ans, est mort dans l'attentat
alors qu'il montait la garde et signalait précisément la présence anormale
d'une fourgonnette. Il laisse en Andalousie une
femme et un fils de six ans. Son récent exil volontaire au Pays basque,
affectation à risque, devait arrondir son salaire et faciliter sa
promotion. Les contraintes d'un quotidien anonyme l'ont exposé au
fanatisme politique. Ce fut le cas de beaucoup des quelque 850 victimes mortelles
de l'ETA en 40 ans de terrorisme indépendantiste.
Les experts évaluent à au moins 100 kg la quantité d'explosifs
utilisée. Un seul des quatre flancs du bâtiment visé
s'est effondré, mais un officier des pompiers interrogé à
la télévision estime que la caserne entière n'est plus
qu'une ruine. Elle est la troisième attaquée à la voiture
piégée depuis l'été 2007, après 15 mois
d'une trêve relative observée par l'ETA lors de négociations
frustrées avec le gouvernement socialiste espagnol de José
Luis Rodriguez Zapatero.
"La démocratie s'imposera à la terreur et la liberté
vaincra le fanatisme assassin" a promis M. Zapatero dans une déclaration
institutionnelle retransmise en direct des Cortes (Parlement) par la télévision
publique. Il s'adressait aux députés qui venaient d'observer
en séance plénière une minute de silence en hommage
à Juan Manuel Piñuel.
Condamnant "le lâche, misérable et criminel attentat perpétré
par l'ETA", le chef du gouvernement a remercié tous les groupes politiques
"de leur appui unanime". Même le président du Parti Populaire,
Mariano Rajoy, chef de la droite parlementaire, venait de lui offrir son
soutien "pour que les Espagnols nous voient ensemble travailler à
la défaite de l'ETA".
Le roi Juan Carlos, les syndicats, le patronat, les associations de victimes
du terrorisme et une multitude d'élus ont, comme après chaque
attentat, fait entendre leur voix dans le rituel collectif des condamnations.
"Feuille de route" souverainiste
L'une des réactions les plus significatives dans le moment politique
actuel est celle de Juan José Ibarretxe, le lehendakari (président)
du Pays basque, l'une des dix-sept régions dites autonomes de l'Espagne.
"Ne souillez pas le nom du peuple basque!" a lancé à l'ETA
ce nationaliste partisan d'un souverainisme exempt de violence.
Il a souligné "tout le tort que fait l'ETA à ceux qui défendent
le peuple basque comme l'un des plus anciens d'Europe et à ceux qui
veulent approfondir son identité".
M. Ibarretxe sera reçu le 20 mai à Madrid par M. Zapatero.
Il tentera à nouveau de le convaincre de négocier avec le Pays
basque une "feuille de route" passant, référendum à
l'appui, par la reconnaissance du droit des Basques "à décider
librement de leur futur" et par la création d'un "organisme commun",
avec compétences exécutives, entre le Pays basque et la Navarre
voisine.
Ce sont les mêmes revendications, mais enrobées de modalités
propres au radicalisme d'extrême gauche de l'ETA, qui ont fait échouer
les négociations des terroristes séparatistes avec M. Zapatero
et avec ses prédécesseurs.
Le "feuille de route" du lehendakari Ibarretxe prévoit aussi la reconnaissance
de "l'identité nationale" basque et caresse l'idée d'une euro-région
basque, réunissant Pays Basque français, Pays Basque espagnol
et Navarre. L'Euskal Herria, soit le grand Pays basque dont l'ETA ne cesse
de rêver à voix haute, serait alors ébauché.
M. Zapatero juge cette "feuille de route" inacceptable. Madrid consentirait
tout au plus à une actualisation, voire un élargissement de
l'autonomie régionale basque, comme pour la Catalogne en 2006.
Dans ces circonstances, est-ce un hasard si le ministre régional basque
de l'Intérieur, Javier Balza, avertit soudain, après l'attentat
de Legutiano, que "l'infrastructure de l'ETA" serait "très puissante",
car s'appuyant sur de nombreux activistes non fichés par la police
et menant une vie apparemment normale? Veut-il suggérer, en démentant
la faiblesse supposée de l'ETA, que l'Espagne devra tôt au tard négocier les
revendications basques et qu'Ibarretxe est un interlocuteur plus acceptable que les terroristes?
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