|
Les victimes sont 3 Espagnols et 3 Colombiens du contingent espagnol
Espagne et ONU (Finul) frappées au Liban : 6 militaires tués dans un attentat attribué à la mouvance d'Al-Qaida
MADRID, lundi 25 juin 2007 (LatinReporters.com) - Le groupe sunnite Fatah al-Islam, qui se
réclame d'Al-Qaida, est considéré à Madrid comme l'auteur probable
de l'attentat à la voiture piégée qui a tué dimanche
dans le sud libanais 6 casques bleus de l'ONU et blessé 2 autres.
Les morts, 3 Espagnols et 3 Colombiens, appartenaient au contingent espagnol
de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul). L'Espagne maintiendra sa mission
dans ce pays.
|
Liban - Véhicule BMR de la Finul d'un type similaire à celui du blindé du contingent espagnol frappé par l'attentat du 24 juin 2007. Photo H. Dahlmo - Wikimedia Commons |
Depuis sa création en 1978, la Finul
a perdu 266 hommes au Liban. Il s'agit toutefois du premier attentat contre
cette force internationale des Nations unies depuis son renforcement après
la guerre de l'été 2006 entre armée israélienne
et chiites du Hezbollah.
Selon un communiqué de la Finul, les premiers résultats de
l'enquête indiquent que l'explosion d'une voiture piégée
a frappé de plein fouet l'un des deux véhicules blindés
d'une patrouille du contingent espagnol en mission ordinaire d'observation
entre les villes de Marjayoun et de Khiam. Dimanche soir à Madrid,
le ministre espagnol de la Défense, José Antonio Alonso, parlait
déjà "d'attentat" et "d'attaque" à la voiture piégée
ou à l'explosif télécommandé.
Le ministre a reconnu lundi que les deux véhicules n'étaient pas équipés
d'inhibiteurs de fréquences contre les explosions télécommandées.
L'état-major n'estimait pas le contingent espagnol en danger imminent.
Pressentant qu'il serait soupçonné, le Hezbollah a rapidement
condamné l'attentat, perpétré dans une zone où
son influence est forte, le qualifiant d'"agression suspecte qui porte atteinte
au Liban sud et à ses habitants".
Le quotidien madrilène El Pais, proche du gouvernement socialiste
espagnol, écrit, en citant des sources du ministère de la Défense,
que le groupe Fatah al-Islam est probablement l'auteur de l'attaque.
En lutte ouverte depuis un mois contre l'armée libanaise, cette
organisation extrémiste regroupant des Palestiniens et d'autres Arabes
de diverses nationalités a accusé la Finul d'avoir bombardé
un camp palestinien le 2 juin et de faire ainsi cause commune avec l'armée.
L'attentat visait donc peut-être la Finul et son rôle au Liban.
Son commandant en chef, le général italien Claudio Graziano,
croit pour sa part qu'il s'inscrit dans une entreprise plus large de déstabilisation
de la région. Il s'est gardé de citer la Syrie ou l'Iran, pays
souvent accusés dans les capitales occidentales d'organiser et/ou
de financer le terrorisme au Liban.
L'Espagne était-elle aussi la cible de l'attentat? Aucune autorité
officielle, libanaise, onusienne ou espagnole ne l'affirme. Néanmoins,
plusieurs communiqués récents d'Al-Qaida critiquaient explicitement
la présence de militaires espagnols au Liban et en Afghanistan.
Les effectifs de la Finul s'élèvent à 13.000 hommes de 28 pays.
Les 1.100 casques bleus espagnols forment en importance le troisième
contingent, après ceux de l'Italie et de la France.
Depuis 1989, l'armée espagnole a perdu lors de missions extérieures
134 hommes et une femme, victimes d'attentats, d'attaques ou d'accidents.
Ces pertes sont liées à des missions effectuées notamment
au Liban, en Afghanistan, en Bosnie, en Irak et au Kosovo.
Au nom de "liens spéciaux historiques, culturels et linguistiques",
l'armée espagnole admet des recrues originaires des pays latino-américains
et de la Guinée équatoriale, ancienne colonie africaine de
l'Espagne. Quatre-vingt pour cent de ces étrangers viennent de l'Equateur et de la Colombie.
Ils représentent actuellement 5,5% des 78.000 militaires
professionnels de l'armée espagnole, constituée exclusivement
de volontaires.
Mais dans les unités d'intervention telles que la Légion et
la Brigade parachutiste, en première ligne dans les missions extérieures,
le pourcentage d'étrangers atteint 30%, ce qui explique les 3 victimes
colombiennes parmi les 6 morts de l'attentat de dimanche. Outre des raisons
économiques, c'est pour obtenir plus facilement la nationalité
du pays d'accueil que des Latino-Américains s'engagent et meurent
parfois sous l'uniforme espagnol et surtout, en Irak, sous l'uniforme des
Etats-Unis.
Si la participation de l'Espagne à la guerre en Irak, de 2003 à 2004, avait
soulevé une vive opposition populaire et contribué à
la victoire du socialiste José Luis Rodriguez Zapatero aux législatives
de mars 2004, le déploiement d'un contingent au Liban est, lui, admis
par toutes les forces politiques espagnoles.
Cela n'empêche pas le Parti populaire (PP, opposition conservatrice) de Mariano Rajoy de
prétendre que ce déploiement s'inscrirait dans la même lutte globale contre
le terrorisme que celle menée en Irak et en Afghanistan. M. Rajoy reproche à
M. Zapatero de "cacher, pour présumer de pacifisme", que la mission
dite de paix au Liban "s'inscrit dans un scénario de guerre". Et le chef de l'opposition d'ajouter:
"L'armée n'est pas une ONG".
Sous le titre "Mourir au Liban", l'éditorialiste d'El Pais parle de "tribut qu'il faut
savoir payer, celui d'une puissance européenne,
huitième économie mondiale, qui se trouve là où
la défense de la paix le requiert". Son confrère du journal
conservateur ABC prend pour sa part l'attentat à témoin afin
d'inviter le président du gouvernement, José Luis Rodriguez
Zapatero, à abandonner son parti pris pro-palestinien dans le conflit
du Proche-Orient.
Le ministre de la Défense, Jose Antonio Alonso, a affirmé que l'Espagne
maintiendra sa mission au Liban. Il devait y présider au rapatriement des six
casques bleus tués. Les malheureux étaient
âgés de 18 à 21 ans. Dans une Espagne en deuil officiel, ils
auront des funérailles d'Etat, précédées des condoléances des nombreux pays,
notamment les Etats-Unis et la France, qui ont condamné l'attentat.
version imprimable
Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
ARTICLES ET DOSSIERS LIÉS
Dossier Terrorisme international
Dossier Espagne
|
|