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Rapport d'observation électorale de l'UE globalement positif, mais...
Bolivie-élections: l'Union européenne dénonce les abus du pouvoir

Les abus électoraux du pouvoir dénoncés par l'Union européenne font la une de nombreux quotidiens en Bolivie. "L'UE observe l'usage politique de biens de l'Etat" (El Deber, 9 décembre 2009) ; "UE: le MAS [parti du président Evo Morales] a abusé de biens de l'Etat" (Los Tiempos, 9 décembre 2009).

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LA PAZ, mercredi 9 décembre 2009 (LatinReporters.com) - "Prolifération de propagande institutionnelle clairement pro-officialiste", "accumulation d'enquêtes judiciaires en pleine campagne électorale" contre l'opposition, "utilisation de ressources publiques" et de "la radio et télévision d'Etat" au service des "candidats du pouvoir" ... Ces entorses à la démocratie, "dans un contexte de fragilité du système de contrôle judiciaire et constitutionnel", sont dénoncées par la mission d'observation de l'Union européenne (UE) après les élections présidentielle et législatives remportées le 6 décembre en Bolivie par Evo Morales.

Présenté aux journalistes le 8 décembre à La Paz par la directrice de la mission, l'eurodéputée roumaine Renate Weber, le Rapport préliminaire d'observation électorale de l'UE faisait le lendemain la une de nombreux quotidiens boliviens. Ils en soulignaient les critiques visant le pouvoir et le parti MAS (Mouvement vers le socialisme) du président Evo Morales, réélu triomphalement dimanche.

Alors que le même 8 décembre Evo Morales affirmait à Cochabamba devant une assemblée de mouvements sociaux que sa nouvelle victoire fait de "la démocratie bolivienne une référence pour l'Amérique latine et pour le monde", le diagnostic de la mission de l'UE, forte de 130 observateurs de 24 pays, a été mal reçu dans l'entourage présidentiel.

Jorge Silva, porte-parole de la campagne électorale du MAS, estime que la mission européenne n'aurait pas tenu compte d'un contexte général dans lequel était accepté qu'Evo Morales "soit à la fois président et candidat", ce qui revenait à "admettre implicitement l'utilisation de biens publics" lors de sa campagne électorale. César Navarro, député du MAS, taxe les observateurs européens de "confusion". Mais en niant, lui, l'utilisation électorale de biens publics, il contredit son coreligionnaire Jorge Silva qui tente de la justifier.

La polémique devrait rapidement retomber car, malgré ses observations négatives, le rapport de la mission de l'UE est globalement positif. Il se félicite de "la poursuite du processus de réformes entamé en 2005 lors d'une journée électorale bien organisée, avec participation élevée".

"Le processus s'est déroulé, en termes généraux, conformément aux standards internationaux en matière d'élections démocratiques" et "la campagne électorale a été couverte par une presse pluraliste", quoique "polarisée", note le rapport.

Un communiqué de la délégation du Parlement européen aux élections boliviennes (délégation distincte de la mission d'observation de l'UE) mentionnait le 9 décembre à Bruxelles l'inexistence "dans le processus électoral d'incidents qui puissent faire douter des résultats". C'est sans doute vrai à propos de la réélection attendue du président Evo Morales, avec 61 à 63% des suffrages selon les sondages effectués dimanche à la sortie des urnes. (Trois jours plus tard, ces sondages servent toujours de référence. Le décompte officiel ne portait en effet le 9 décembre que sur 30% des suffrages exprimés, octroyant un provisoire 51% au président Morales).

Mais que, comme le rapporte de manière détaillée la mission de l'UE, des biens et organismes publics -radio, télévision, bâtiments et véhicules officiels- aient été utilisés à leur profit exclusif ou préférentiel par Evo Morales et son parti MAS lors de la campagne électorale n'est pas un dérapage anodin si l'on considère que l'objectif principal du président, dont nul ne doutait de la réélection, était de conquérir une majorité parlementaire des deux tiers assurant un pouvoir absolu.

Sur ce point, rien n'était joué d'avance. Preuve en est qu'il manque actuellement, selon les projections et dans l'attente des résultats complets, trois élus à Evo Morales pour atteindre le chiffre magique de 111 députés et sénateurs sur un total de 166. C'est à cette majorité des deux tiers des deux chambres combinées que la nouvelle Constitution associe un pouvoir sans partage.

On comprend mieux, dès lors, la tentation, dans le camp présidentiel, de coups de pouce extralégaux ou abusifs. Dans ce contexte, le rapport de la mission de l'UE relève que le principal rival d'Evo Morales, l'ancien officier conservateur Manfred Reyes Villa, second de la présidentielle sur un score de 23 à 25%, fut pendant la campagne électorale la cible d'une persécution judiciaire marquée par l'ouverture de 13 enquêtes et une interdiction de sortir du pays réduisant ses possibilités de solliciter les suffrages des émigrés boliviens. Au-delà du cas de Manfred Reyes, les observateurs européens rappellent que la paralysie du Tribunal constitutionnel bolivien depuis 2007 rend aléatoire la restitution de droits électoraux bafoués.

Quant à l'incroyable contingent de 400.671 citoyens fantômes, quasi 8% des électeurs, dont on ne retrouve pas la trace dans les registres civils, mais auxquels la Cour nationale électorale a octroyé le droit de vote [ndlr: exercé par qui?] sous la pression menaçante d'Evo Morales et du MAS, les observateurs européens le mentionnent sans crier au scandale. Ils invitent pudiquement les autorités boliviennes à "créer un registre officiel unique, technologiquement avancé et actualisé en permanence".

Pour la même raison et avec la même pudeur, l'analyse du Centre Carter (fondé par l'ex-président des Etats-Unis Jimmy Carter), dont les observateurs électoraux sont appréciés par les régimes de gauche d'Amérique latine, recommande à la Bolivie et à sa Cour nationale électorale de "poursuivre leurs efforts pour consolider la crédibilité des institutions et des processus électoraux". Concrètement, le Centre Carter souhaite "le perfectionnement de l'actuel recensement biométrique [des électeurs] avant les élections [municipales et régionales] d'avril 2010".


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