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- Alfredo Palacio nouveau président équatorien - Destitué, Lucio Gutierrez sollicite l'asile du Brésil
L'instabilité en Equateur menace la Colombie et le Pérou
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Alfredo Palacio, nouveau président de l'Equateur, prête serment Photo Emmanuel Roch |
QUITO, jeudi 21 avril 2005 (LatinReporters.com) - La destitution du président
Lucio Gutierrez, auquel a succédé mercredi le vice-président
Alfredo Palacio, confirme l'instabilité de l'Equateur. La crise menace
ses voisins, la Colombie et le Pérou, deux pays dont les gouvernements
sont les seuls considérés aujourd'hui comme pro-américains
en Amérique du Sud.
Destitué par la majorité du Congrès des députés
et abandonné par l'armée après une semaine de manifestations
qui ont fait trois morts et plus de cent blessés à Quito, le
déjà ex-président équatorien Lucio Gutierrez
fuyait mercredi en hélicoptère le palais présidentiel
et se réfugiait à l'ambassade du Brésil, pays dont il
sollicite l'asile politique.
Après avoir prêté serment comme nouveau chef de l'Etat,
le vice-président Alfredo Palacio, cardiologue de 66 sans affiliation
politique, a promis de "refonder la République". Il envisage de convoquer
un référendum sur une nouvelle Constitution.
La crise actuelle découle du vaste dégoût populaire à
l'égard de la corruption et de l'incapacité gouvernementale
contre la misère. Il est difficile de prévoir si, dans les
jours et les semaines qui viennent, l'Equateur sera classé "à
gauche" ou "à droite". A Quito, les dizaines de milliers de manifestants
conspuaient l'ensemble de la classe politique en criant "Qu'ils s'en aillent
tous".
Ex-colonel putschiste de 48 ans, Lucio Gutierrez fut considéré
comme "le Chavez équatorien" lorsqu'il remporta les élections
présidentielles de 2002, promettant une lutte sans merci contre la
corruption et la pauvreté, qui frappe près de 80% des 13 millions
d'Equatoriens.
Comme le président vénézuélien Hugo Chavez, ex-officier
putschiste lui aussi, Lucio Gutierrez souleva un immense espoir populaire,
surtout au sein de la forte minorité indienne, qui constitue entre
30 et 40% de la population de l'Equateur.
Mais à la différence d'Hugo Chavez, Lucio Gutierrez n'a jamais
pu s'appuyer sur une majorité parlementaire propre. Malgré la victoire à
la présidentielle de son leader, la Société patriotique de Lucio Gutierrez
ne put faire élire en 2002 que ... 5 députés sur les 100 du Congrès!
L'homme était plus connu que son parti trop neuf et sans racines.
A la recherche perpétuelle d'alliances, Lucio Gutierrez tenta de soumettre le pouvoir
judiciaire, au profit notamment de l'ex-président Abdala Bucaram,
revenu le 2 avril dernier de son exil panaméen après avoir
été amnistié de multiples délits de corruption par une nouvelle
Cour suprême aux ordres de la présidence de la République.
Symbole de la décadence politique, Abdala Bucaram disposait encore au Congrès
d'alliés sur lesquels voulait s'appuyer Gutierrez. Le retour de Bucaram mit le feu aux
poudres, déclenchant à Quito les émeutes qui ont forcé Lucio
Gutierrez à fuir.
Autre différence décisive entre Hugo Chavez et Lucio Gutierrez: alors que,
malgré des hésitations initiales, l'armée avait finalement soutenu le
président vénézuélien dans des moments dramatiques, le ramenant au
pouvoir dont il fut évincé pendant 48 heures en avril 2002, Gutierrez, lui, fut
définitivement lâché par les militaires après une semaine de
manifestations pourtant nettement moins massives que celles organisées au Venezuela par
les anti-chavistes.
Et contrairement encore à Hugo Chavez, Lucio Gutierrez s'était
rapproché des Etats-Unis. Il négociait avec Washington un traité
de libre-échange et ne remettait en question ni la dollarisation impopulaire
de l'Equateur ni l'utilisation par l'aviation américaine de la base
militaire de Manta, sur la côte pacifique équatorienne, plate-forme
de l'espionnage aérien contre le narcotrafic et la guérilla
colombienne.
Dès 1999, un porte-parole de la guérilla marxiste des FARC
(Forces armées révolutionnaires de Colombie), Rodolfo Gonzalez,
assimilait la base de Manta à "un poste avancé de l'impérialisme
gringo". La guérilla colombienne n'a pas pardonné à
Lucio Gutierrez l'arrestation de l'un de ses chefs, Simon Trinidad, interpellé
le 2 janvier 2004 à Quito par la police équatorienne et livré
aux autorités colombiennes, qui l'ont extradé aux Etats-Unis
pour y répondre de l'accusation de narcotrafic.
Avant cet épisode, des émissaires des FARC tenaient ouvertement
des conférences de presse à Quito. Voisin de la Colombie, l'Equateur
était, pour les rebelles colombiens, une base arrière naturelle
et un couloir à peine clandestin d'approvisionnement en armes. L'instabilité
politique actuelle pourrait rendre à l'Equateur ce rôle déstabilisateur
pour la Colombie, principal allié politique et militaire des Etats-Unis
en Amérique du Sud.
Quant à l'autre voisin de l'Equateur, le Pérou, le voilà
ébranlé sur son flanc nord par le tourbillon équatorien,
comparable à celui qui, sur son flanc sud, avait débouché
sur la fuite aux Etats-Unis, en octobre 2003, du président bolivien
néolibéral et pro-américain Gonzalo Sanchez de Lozada.
Lui-même proche des Etats-Unis, sur lesquels il s'appuie pour empêcher
la renaissance de la guérilla maoïste du Sentier lumineux et
avec lesquels il négocie aussi un traité de libre-échange,
le président péruvien Alejandro Toledo est menacé par
diverses accusations de corruption. Sa popularité s'est effondrée
au-dessous de 10%. Les événements d'Equateur et de Bolivie
le fragilisent davantage.
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