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Malgré le non de l'Espagne à la libre association, les Basques décideront le 17 avril
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Les prochaines élections basques auront lieu le 17 avril. Des affiches électorales du président basque Ibarretxe similaires à celles-ci défieront bientôt Madrid |
par Christian Galloy
MADRID, mercredi 2 février 2005 (LatinReporters.com) - Approuvée
le 30 décembre par le Parlement basque, la libre association -et non
plus soumission à l'Espagne- défendue mardi à Madrid
devant le Congrès espagnol des députés par le président
basque, le nationaliste Juan José Ibarretxe, a été rejetée
par 313 voix contre 29 et 2 abstentions. Le choc des deux légitimités,
l'espagnole et la basque, sera arbitré le 17 avril par les électeurs
basques.
La "libre association" et ses corollaires -nationalité basque, relations
directes du Pays basque avec l'Europe et le monde, etc.- seront en effet l'axe des
prochaines élections régionales. Le président Ibarretxe a annoncé
mercredi qu'elles auraient lieu le 17 avril prochain. Leur anticipation d'environ un mois
est considérée comme une réponse au non du Congrès espagnol au
"Plan Ibarretxe" de libre association.
Quel qu'en soit le vainqueur, ces élections seront historiques.
Si le pouvoir régional restait aux mains d'une coalition formée
autour du Parti nationaliste basque, le PNV de M. Ibarretxe, un référendum
-qualifié aujourd'hui déjà d'illégal par Madrid-
permettrait aux Basques de dire clairement oui ou non à la libre association
et au principe général d'autodétermination pour définir
les relations avec l'Espagne, sans exclure leur éventuelle rupture
définitive à l'avenir.
Par contre, si les socialistes (des "espagnolistes" disent les nationalistes)
de José Luis Rodriguez Zapatero, le chef du gouvernement espagnol,
devenaient l'axe d'un gouvernement régional, le PNV perdrait pour la
première fois en 25 ans de démocratie son emprise dominante
sur le Pays basque. Son projet souverainiste de libre association ne serait
plus alors qu'un rêve déçu.
Dans ce contexte, le débat parlementaire de mardi peut être
considéré comme le premier acte de campagne des prochaines élections
basques.
"Je suis venu défendre le droit du peuple basque à décider
de son futur" lançait d'emblée Juan José Ibarretxe aux
députés espagnols. Jamais un président d'aucune des 17
régions dites autonomes d'Espagne n'avait débattu du haut d'une telle
tribune. Selon la Constitution, le Parlement national doit filtrer -acceptant,
amendant ou refusant- toute révision d'un statut d'autonomie régionale.
"Je viens la main tendue pour négocier. On ne peut pas dire non au
peuple basque sans négocier... Notre proposition de libre association
et de respect mutuel est compatible avec un Etat plurinational" poursuivait
le président basque. Il évitait systématiquement le mot
"Espagne", le remplaçant par "Etat".
Estimant que la Constitution espagnole de 1978 reconnaît elle-même
que l'autonomie régionale ne suppose pas le renoncement des Basques
à leurs "droits historiques", faisant remonter les racines du problème
basque à la suppression de ces droits au 19e siècle et relativisant
ainsi la plus récente "violence inhumaine" des séparatistes
armés de l'ETA, Juan José Ibarretxe a estimé que
la solution passe par "le pacte, auquel recourent des sociétés
modernes au Canada-Québec, en Irlande, en Flandre, en Wallonie, etc."
"Nous devons pouvoir décider de vivre ensemble. La convivance ne
peut être imposée à personne" clamait-il, pulvérisant
du coup le "Si nous vivons ensemble, nous devons décider ensemble" que
venait d'exprimer le chef du gouvernement espagnol, le socialiste Zapatero.
A la fin de chacune de ses deux interventions, le président Ibarretxe
a promis qu'il donnerait le dernier mot au peuple basque, allusion à
un probable référendum. "Le futur nous appartient, nous l'écrirons
de notre propre main" a-t-il conclu.
Les appels à la "légalité démocratique" et à
la "loyauté constitutionnelle" lancés tant par M. Zapatero que
par Mariano Rajoy, président du Parti populaire (opposition conservatrice),
confirmaient le dialogue de sourds entre deux logiques nationalistes, l'espagnole
et la basque.
Le conservateur Rajoy n'a pas mâché ses mots. Accusant Juan
José Ibarretxe de poursuivre les mêmes buts que les terroristes
indépendantistes de l'ETA, il a assuré que le Parti populaire
"ne trahira pas la mémoire de quasi mille Espagnols assassinés
par l'ETA".
Par contre, au nom du gouvernement espagnol qu'il préside, le socialiste
José Luis Rodriguez Zapatero a laissé une porte de sortie aux
nationalistes basques, invitant M. Ibarretxe à ranger son plan de
libre association pour tenter d'aboutir avec Madrid à un "accord historique
et définitif" qui élargirait tout de même l'autonomie
basque.
L'ouverture relative de M. Zapatero vise à attirer les plus modérés
des électeurs nationalistes aux prochaines élections basques.
Elle répond aussi à l'incertitude catalane. La Catalogne veut
à son tour réviser son statut d'autonomie régionale
et les indépendantistes de la Gauche républicaine catalane
(ERC) ont voté, comme les nationalistes galiciens, en faveur de la
libre association basque. Or, l'ERC contribue à la stabilité
parlementaire des socialistes de M. Zapatero, dont la majorité au
Congrès des députés n'est que relative.
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