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25e anniversaire de la tentative de coup d'Etat du 23-F
Espagne - Le cerveau du putsch militaire de 1981 voulait 6 ministres de gauche
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"La tentative de coup d'Etat sur le point d'échouer" titrait le 24 février 1981 El Pais sur une photo d'Antonio Tejero, pistolet au poing à la tribune du Congrès des députés |
MADRID, jeudi 23 février 2006 (LatinReporters.com)
- Le cerveau politique du putsch militaire avorté en Espagne le 23
février 1981, le général Alfonso Armada, voulait présider
un "gouvernement de concentration" avec, parmi ses ministres, des personnalités
communistes et socialistes. Pour le 25e anniversaire du putsch, le quotidien
de centre droit El Mundo publie les noms de ceux avec qui Armada prétendait
gouverner.
Membre de l'équipe du vice-président du Congrès des
députés, où parlementaires et ministres étaient
séquestrés depuis 18h25 par les quelque 200 gardes civils armés
du lieutenant-colonel Antonio Tejero, la doctoresse Carmen Echave, aujourd'hui
décédée, se trouvait suffisamment proche pour entendre
les noms qu'Armada citait à Tejero, perplexe sous son célèbre
bicorne. La doctoresse notait à mesure, sur un agenda, chaque nom
prononcé, avec en regard les attributions ministérielles proposées
par Armada.
Selon ces notes reproduites par El Mundo, le "gouvernement de concentration"
qu'aurait peut-être formé le général Armada si
le putsch avait réussi s'ouvrait aux quatre grands partis nationaux
de l'époque: l'UCD (Union du centre démocratique), le PSOE
(Parti socialiste ouvrier espagnol), l'AP (Alliance populaire, droite) et
le PCE (Parti communiste espagnol).
Outre trois généraux, dont lui-même, Alfonso Armada
incluait, parmi les 19 noms de sa liste gouvernementale, six personnalités
de gauche avec le portefeuille qu'il leur confierait. A savoir Felipe Gonzalez
(PSOE): vice-président chargé des Affaires politiques; Javier
Solana (PSOE): ministre des Transports et des Communications; Enrique
Mugica (PSOE): ministre de la Santé; Gregorio Peces Barba (PSOE):
ministre de la Justice; Jordi Sole Tura (PCE): ministre du Travail; Ramon
Tamames (PCE): ministre de l'Economie.
Elu démocratiquement en 1982, Felipe Gonzalez fut le premier socialiste
à gouverner, jusqu'en 1996, l'Espagne
post-franquiste. Quant à
Javier Solana, d'abord ministre de Felipe Gonzalez, puis secrétaire
général de l'OTAN, il est actuellement le Haut représentant
pour la Politique étrangère et de sécurité commune
(PESC) de l'Union européenne.
Le général Armada voulait faire approuver sa proposition de
"gouvernement de concentration" par les députés. Mais le lieutenant-colonel
Tejero, qui croyait que le putsch instaurerait un régime militaire
pur et dur, tomba des nues en apprenant qu'il devait en fait contribuer,
avec ses gardes civils, à la nomination de ministres de gauche
et il refusa net au général Armada l'accès à
l'hémicycle parlementaire.
Cette rébellion dans la rébellion fut déterminante
dans l'échec du putsch. Depuis 25 ans, toutes les analyses de cette
tentative de coup d'Etat confirment l'affrontement au Congrès des
députés entre Armada et Tejero. Hasard ou non, ce n'est qu'après
le fiasco de cette tentative d'approbation parlementaire d'un "gouvernement
de concentration" que le roi Juan Carlos, en grand uniforme, lançait
à la télévision, le 24 février à 1h15
du matin, son appel décisif au respect des libertés et de la
Constitution.
D'autres facteurs auraient probablement fait échouer le putsch. Ce
n'est qu'à Valence, contrôlée par le lieutenant-général
Jaime Milans del Bosch, que les chars occupèrent la rue. En outre,
on imagine mal les députés donner leur accord sous la menace
des armes à un gouvernement pseudo-démocratique présidé
par un général.
Mais cette idée ne sortait pas du néant. Proche du roi Juan
Carlos, dont il fut le secrétaire, le général Armada
multipliait dans les mois précédant le putsch les contacts
avec des politiciens de tous bords. Il prônait l'avènement d'un
de Gaulle espagnol qui se substituerait au chef du gouvernement centriste,
Adolfo Suarez, débordé par les nationalismes basque et catalan,
par les attentats des Basques de l'ETA
et par la grogne qui en résultait au sein de l'armée.
La majorité de la classe politique semblait favorable à soutenir
une motion de censure contre Adolfo Suarez, qu'auraient trahi plusieurs élus
de son propre parti, l'UCD. Suarez prit les devants en démissionnant
le 29 janvier 1981. Les partis politiques congelaient alors la voie gaullienne.
Armada, non. Il cherchera en vain à l'imposer le 23 février, tentant
de se présenter au Parlement comme un messie sauvant la nation d'un
putsch qu'il pilotait pourtant lui-même, au moment où le Congrès
des députés votait la confiance au successeur d'Adolfo Suarez,
le centriste Leopoldo Calvo Sotelo.
Trente-deux officiers et un civil furent jugés et condamnés
pour la tentative de putsch dite du 23-F. Cet événement majeur
a consolidé la monarchie et libéré la démocratie
espagnole de la tutelle militaire.
Condamné à 30 ans de prison, mais libéré dès
1988, Alfonso Armada commercialise aujourd'hui avec succès,
à 86 ans, des camélias qu'il cultive en Galice sur sa propriété
de 36 hectares.
Quant à Antonio Tejero, 73 ans, il peint dans sa retraite de
Malaga des portraits et des paysages. La cote de ses tableaux surpasse trois
mille euros. Condamné également à 30 ans de prison,
il en purgea la moitié.
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