MADRID, dimanche 27 décembre 2009 (LatinReporters.com) -
"Le futur de l'Europe, son futur moral, spirituel et même biologique passe
par la famille, par vous autres, chères familles chrétiennes"
a affirmé le 27 décembre Mgr Rouco Varela, cardinal-archevêque
de Madrid. Son
homélie lors
de la messe pour la défense de
la famille était prononcée devant des dizaines de milliers de catholiques
dans la capitale d'un pays, l'Espagne, qui va assumer la présidence tournante de l'Union
européenne (UE) au 1er semestre 2010.
La multitude était venue en famille, avec de nombreux enfants, de diverses régions d'Espagne et
d'autres pays d'Europe. Pour la messe, le vaste autel dressé à Madrid sur la Plaza de Lima accueillait quelque
40 évêques espagnols et 14 évêques d'autres nations
du Vieux continent. Plus de mille prêtres participaient au service
religieux. Des drapeaux espagnols, français, hollandais,
polonais, italiens, tchèques, portugais et hongrois émergeaient de la foule.
Une connexion vidéo en direct de Rome sur écran géant
avait d'abord permis au
pape Benoît XVI de saluer le grand rassemblement
de Madrid. S'exprimant en espagnol, le souverain pontife a célébré
"la famille fondée sur le mariage entre
un homme et une femme", lui attribuant "une importance suprême pour
le présent et l'avenir de l'humanité". En 1981, sur la même
Plaza de Lima, le pape Jean-Paul II avait déjà proclamé
que "le futur de l'humanité passe par la famille chrétienne".
Le caractère européen conféré à cette
3e Fête annuelle de la famille à Madrid, organisée
par l'archevêché de la capitale et l'organisation religieuse
Camino Neocatecumenal, semble inspiré par l'imminente présidence
espagnole de l'UE, du 1er janvier au 30 juin 2010.
Sur le
site Internet de ladite présidence, le gouvernement socialiste
de José Luis Rodriguez Zapatero souligne que "l'Espagne dispose de lois très
progressistes dans le domaine social, comme le mariage entre homosexuels,
ou dans le domaine scientifique, comme la loi autorisant la recherche sur
des cellules souches". Cela suffit à illustrer la distance séparant
l'Eglise d'un exécutif socialiste dont, en outre, la libéralisation
accrue de l'avortement, érigé en droit, n'attend plus que le
feu vert du Sénat.
Sans le prendre à partie explicitement, Mgr Rouco visait certes aussi
le gouvernement espagnol en avertissant dans son homélie que la situation
de la famille traditionnelle en Europe "se dégrade" à cause
du mariage homosexuel, de l'avortement, de l'euthanasie et du divorce, que
sa facilité "assimile à la répudiation" a dit le prélat.
Sans la famille chrétienne, "l'Europe se retrouverait pratiquement
sans enfants, soit sans vie future" a prédit le cardinal Rouco, qui
est aussi président de la Conférence épiscopale espagnole.
L'Eglise sert-elle les valeurs qu'elle prétend défendre?
La Constitution espagnole de 1978 a instauré et garantit la séparation du spirituel
et du temporel, mais les relations entre l'Eglise et les gouvernements socialistes
successifs sont marquées par de multiples poussées de fièvre.
Loin de nuire à la gauche, elles semblent contribuer à son
unité, surtout lorsqu'elles se produisent en période électorale.
Les imprécations souvent désuètes de l'Eglise espagnole,
qui agite encore l'excommunication, nuisent-elles aux
valeurs qu'elle prétend défendre? "L'avortement est un crime
atroce et irréparable, mais fustigé par une Eglise toujours imbue d'un droit divin de
condamner, qui hérisse l'intelligence et fragilise donc la persuasion, ce crime en devient
malheureusement plus acceptable socialement" regrette un journaliste
européen en poste depuis plus de 30 ans à Madrid.
Le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) de M. Zapatero est devancé dans les sondages
depuis plusieurs mois par les conservateurs du Parti Populaire (PP) de Mariano Rajoy. L'écart
actuel de cinq points en faveur du PP est peu commun. Les observateurs ne l'attribuent nullement aux
frictions entre les socialistes et l'Eglise, mais bien à la gestion catastrophique
de la crise économique par la gauche gouvernementale, confrontée
à un taux de chômage supérieur à 19% (selon Eurostat).