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LE PLAN ARIAS (ACCORD DE SAN JOSÉ) VRAIMENT MORT ?
Honduras : Zelaya revient par la frontière avec le Nicaragua

Manuel Zelaya, en partance le 23 juillet 2009 de Managua pour le Honduras au volant d'un tout-terrain. A ses côtés, le ministre vénézuélien des Relations extérieures, Nicolas Maduro. Ce ministre et la protection de la police nicaraguayenne "reflètent l'ingérence de Daniel Ortega [président du Nicaragua] et de Hugo Chavez dans le conflit interne du Honduras" affirme la légende de cette photo à la une, le 24 juillet, de l'influent journal nicaraguayen La Prensa. (Photo La Prensa / G. Miranda)

MANAGUA / TEGUCIGALPA , vendredi 24 juillet 2009 (LatinReporters.com) - Le président déchu du Honduras, Manuel Zelaya, devait tenter ce week-end de rentrer dans son pays par voie terrestre à partir du Nicaragua. Pour l'en empêcher ou le cas échéant le mettre en état d'arrestation, l'armée hondurienne est déployée aux frontières. On redoute des affrontements entre partisans du président Zelaya, expulsé lors du coup d'Etat du 28 juin, et sympathisants de son successeur Roberto Micheletti. La crise hondurienne s'inscrit dans la partie d'échecs idéologique qui se joue en Amérique latine.

C'est à Managua, capitale du Nicaragua sandiniste, avec pour passager le ministre vénézuélien des Relations extérieures, Nicolas Maduro, que Manuel Zelaya prenait lui-même jeudi le volant d'un véhicule tout-terrain pour se diriger vers le Nord et le Honduras, distant d'environ 300 km. Les automobiles qui l'accompagnent en caravane transportent de nombreux journalistes. Le mythique Comandante Cero de la révolution sandiniste, Eden Pastora, est aussi du voyage.

Hugo Chavez, président du Venezuela, avait coordonné le 5 juillet une première tentative avortée de retour au Honduras de Manuel Zelaya dans un avion vénézuélien. En août 2008, le Honduras présidé par Zelaya ralliait le camp de la gauche radicale latino-américaine en adhérant à l'Alternative [aujourd'hui Alliance; ndlr] bolivarienne pour les Amériques, l'ALBA. Celle-ci englobe actuellement le Venezuela, le Nicaragua, Cuba, la Bolivie, l'Equateur, le Honduras, la Dominique, Antigua-et-Barbuda, ainsi que Saint-Vincent-et-les-Grenadines. A Tegucigalpa, les nouvelles autorités du Honduras ont annoncé leur intention de sortir leur pays de cette alliance.

Craignant qu'elle ne débouche sur des heurts sanglants, le secrétaire général de l'Organisation des Etats américains (OEA), José Miguel Insulza, juge "précipitée" la nouvelle tentative de retour de Manuel Zelaya. A Washington, elle est qualifiée de "peu prudente" par l'administration du président Barack Obama. L'OEA et les Etats-Unis, ainsi que la Colombie et deux pays de la gauche latino-américaine modérée, le Chili et l'Uruguay, ont exprimé le 23 juillet l'espoir d'une relance de la médiation du Costa Rica. Par contre, les principaux pays de l'ALBA, Venezuela en tête, ne voient en cette médiation qu'un stratagème pour consolider "le régime putschiste" de Tegucigalpa.

Rejeté le 19 juillet par le gouvernement hondurien actuel, le plan de conciliation présenté par le médiateur Oscar Arias, président du Costa Rica, a été restructuré dans sa présentation, mais non dans sa substance, sous le nom "Accord de San José". Mais le 22 juillet, c'est la délégation de Manuel Zelaya qui le rejetait.

Le président de facto du Honduras, Roberto Micheletti, n'accepte pas le retour à la présidence de Manuel Zelaya, retour que prévoit l'Accord de San José, et Zelaya, lui, contrairement à l'opposition expresse du même Accord de San José, prétend toujours opérer une réforme radicale de la Constitution hondurienne, en direction du socialisme du 21e siècle cher à Hugo Chavez, par une consultation populaire ouvrant la voie à une Assemblée constituante. Mais la Constitution hondurienne n'autorise pas un tel processus. Le coup d'Etat du 28 juin, exécuté par l'armée et chapeauté par le pouvoir judiciaire et la quasi totalité des députés honduriens, avait précisément empêché cette consultation populaire jugée illégale par les principales institutions du pays, à la notable exception du président Zelaya.

Un éventuel échec de la nouvelle tentative de retour de Manuel Zelaya et le nombre croissant en Amérique latine de voix favorables à la médiation du président costaricain Oscar Arias, médiation que soutient aussi l'Union européenne, favoriseraient une acception future par MM. Zelaya et Micheletti de l'Accord de San José. Il n'est donc peut-être pas mort. Son application serait une défaite de la gauche radicale, puisque cet accord refuse le changement de régime que cette gauche et Manuel Zelaya espèrent au Honduras par la voie d'une Assemblée constituante, comme au Venezuela, en Bolivie et en Equateur.

A l'image de Napoléon revenant de l'île d'Elbe...?

Diverses organisations sociales honduriennes appuyant Manuel Zelaya tentent, malgré des barrages de l'armée, de se regrouper à proximité des postes frontières les plus proches de la ville nicaraguayenne d'Esteli. L'ampleur du soutien populaire au président déchu est difficilement mesurable. Grand propriétaire terrien et magnat de l'industrie du bois, élu en 2005 président du Honduras comme candidat du Parti libéral (droite), mais renié par ce même parti à cause de son virage idéologique inattendu, Manuel Zelaya n'a pour soutien parlementaire visible dans son propre pays que les 5 députés (sur un total de 128) du petit parti de gauche Unification démocratique. La plus importante manifestation en sa faveur, le 5 juillet à l'aéroport de Tegucigalpa, où son avion fut alors empêché d'atterrir, avait réuni 30.000 personnes, y compris peut-être, selon les soupçons des autorités, de nombreux activistes venus clandestinement du Salvador, du Guatemala et surtout du Nicaragua, trois pays gouvernés à gauche frontaliers du Honduras.

Pour empêcher ou pour le moins compliquer le retour de Manuel Zelaya, le couvre-feu décrété par le Honduras s'étend de midi jusqu'à l'aube au long d'une partie de la frontière avec le Nicaragua et le Salvador.

Le chef des forces armées, le général Romeo Vasquez, a averti le président déchu qu'il ne garantissait pas sa sécurité. "Nous ne pouvons pas nous responsabiliser de la sécurité de personnes qui, pour fomenter la violence généralisée dans le pays, sont susceptibles d'être attaquées, y compris par leurs propres partisans, dans l'unique but d'en faire des martyrs" affirme un communiqué du ministère de la Défense du Honduras.

En réponse, notamment sur les ondes de radios nicaraguayennes pouvant être captées au Honduras, Manuel Zelaya exhorte les soldats honduriens "à rendre leur fusil et à se soumettre à l'autorité choisie par le peuple", c'est-à-dire à Zelaya lui-même. Il espère mener à partir de la frontière une marche populaire et victorieuse sur Tegucigalpa. En somme, une tentative de réédition exotique, plus pacifique, plus courte et surtout, si possible, sans Waterloo, des Cent-Jours de Napoléon revenant de l'île d'Elbe...

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