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Fujimori: le Japon soutient l'ex-président du Pérou détenu au Chili

Alberto Fujimori - UN photo
SANTIAGO DU CHILI, mardi 8 novembre 2005 (LatinReporters.com) - L'Empire du Soleil levant au secours de son fils prodigue!... Le Japon irrite le Chili en le priant de "traiter de manière juste" l'archicélèbre Nippo-Péruvien Alberto Fujimori. Détenu à Santiago où il atterrissait dimanche après cinq ans d'exil à Tokyo, Fujimori, 67 ans, risque l'extradition vers le Pérou dont il veut reconquérir la présidence en avril 2006.

Chef d'Etat du Pérou de 1990 à 2000, poursuivi par la justice de ce pays et donc fiché par Interpol sous l'accusation de corruption et crimes contre l'humanité, Fujimori affirmait en débarquant à Santiago: "J'ai l'intention de séjourner temporairement au Chili, étape sur le chemin du retour au Pérou, et de respecter l'engagement pris avec un important secteur du peuple péruvien, qui m'a convoqué pour être candidat à la présidence de la République aux élections de 2006".

Au Japon, qui a toujours refusé de l'extrader, Fujimori est un demi-dieu à la fois pour être l'unique Japonais à avoir présidé un autre pays et pour avoir, en 1997 lorsqu'il dirigeait le Pérou, fait libérer sains et saufs 72 des 73 otages retenus à l'ambassade du Japon à Lima par un commando du MRTA (Mouvement révolutionnaire Tupac Amaru), dont les 14 membres furent tués dans l'assaut militaire du bâtiment diplomatique.

Quelques heures après son installation dans un hôtel de Santiago, Fujimori était appréhendé par la police chilienne. Branle-bas de combat, aussitôt, au Pérou voisin. Son président, Alejandro Toledo, priait par téléphone le ministre chilien des Affaires étrangères, Ignacio Walker, de livrer administrativement Fujimori à la police péruvienne. Pour faire monter la pression, le ministre de l'Intérieur et le procureur général du Pérou étaient dépêchés à Santiago.

"Alberto Fujimori est aux mains de la justice. Il n'existe aucune possibilité de procéder administrativement" expliquait néanmoins aux journalistes le ministre Walker. Recourir au traité bilatéral d'extradition est donc l'unique voie pour le Pérou, qui restera en conséquence suspendu aux décisions de la justice chilienne pendant au moins deux mois et sans doute davantage avant de se faire livrer Fujimori ou de subir l'affront de sa relaxe. Une requête de liberté provisoire présentée par les avocats de Fujimori a été rejetée par la Cour suprême de Santiago.

Dans ce tohu-bohu sur fond de police et de prison, les ambitions présidentielles d'Alberto Fujimori paraissent utopiques, d'autant plus que les candidatures aux élections péruviennes d'avril doivent être définitivement formalisées au plus tard le 9 janvier prochain. En outre, l'ex-président a été déclaré inéligible par le tribunal constitutionnel du Pérou.

Il n'empêche que l'assourdissante couverture médiatique des moindres gestes et paroles d'Alberto Fujimori pourrait être rentabilisée en cette période préélectorale par le parti fujimoriste "Si cumple" (nom dont la traduction littérale est "Oui il accomplit" ou "Oui il tient parole").

Des sondages attribuent parfois plus de 20% d'intentions virtuelles de vote à l'ex-président. A défaut de briguer la présidence, son fils cadet Kenji Fujimori, jeune agronome, tentera peut-être de faire un tabac aux législatives concomitantes de la présidentielle du 9 avril 2006. Le fujimorisme respire donc encore.

Cette épopée politico-judiciaire se déroule dans un décor de polémique internationale. Quelques jours avant l'arrivée de Fujimori à Santiago, qualifiée de "surprenante" par le président chilien Ricardo Lagos, le Pérou décrétait unilatéralement sa souveraineté sur une étendue maritime de 35.000 km2 que le Chili considère comme sienne. D'où des relations bilatérales houleuses qu'une éventuelle mansuétude de la justice chilienne à l'égard de Fujimori risquerait de porter au rouge vif.

Dans cet embrouillamini, il ne manquait que l'irruption du Japon. Une note du gouvernement de Tokyo remise lundi par son ambassadeur à Santiago au chef de la diplomatie chilienne, Ignacio Walker, prie le Chili de "traiter de manière juste et sans discrimination" Alberto Fujimori. La note précise qu'en tant que citoyen nippon, "il doit être jugé de manière correcte". Le Japon veut en outre "être informé de l'évolution de ce dossier".

Est-ce à cause de cette pression insolite que le ministre Walker a suspendu sa visite à Tokyo, prévue du 9 au 13 novembre? Elle devait préparer l'ouverture de la négociation d'un traité de libre-échange entre le Chili et le Japon.

Japonais, Chiliens et Péruviens sont ainsi suspendus au sort d'un homme surnommé en outre à Lima, pour ses yeux bridés, "le Chinois"...

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