|
Pisco et Ica, à 300 km au sud de Lima, sont les villes les plus touchées
Pérou : menace de séisme humanitaire après le tremblement de terre
LIMA, samedi 18 août 2007
(LatinReporters.com) - En mêlant données de la Défense
civile et du Corps général des pompiers, le bilan du tremblement
de terre du 15 août au Pérou fluctuait samedi matin entre 496 et
510 morts et entre 1.042 et 1.500 blessés. S'y ajoutent 33.192 habitations
détruites, au moins 85.000 sinistrés sans toit et des villes privées
d'eau courante, d'électricité et de vivres suffisants. Le Pérou
du président social-démocrate Alan Garcia est désormais
menacé par un séisme humanitaire.
|
Recensement de sinistrés dans la région d'Ica Photo INDECI (Instituto Nacional de Defensa Civil)
|
Le 15 août à 18h41 locales, le sol et les édifices tremblèrent
pendant plus de deux minutes. L'épicentre du séisme,
d'une magnitude de 7,9 sur l'échelle de Richter, se situait
dans l'océan Pacifique à 60 km à peine au large de la
ville côtière péruvienne de Pisco. La secousse était
ressentie en Bolivie, au Chili, en Equateur et en Colombie
Du Chili au Mexique, l'alerte au tsunami était aussitôt donnée
sur toute la façade pacifique de l'Amérique latine. Dans un
message télévisé à la nation, le président
Garcia appelait la population à s'éloigner des côtes.
Heureusement "la mer n'est pas sortie", comme disent des Péruviens
pourtant peu rassurés pas les nombreuses répliques du tremblement,
l'une atteignant vendredi la magnitude de 5,5.
A 240 km au sud de Lima, Pisco, 120.000 habitants, "est détruite à
75%" affirme son maire, Juan Mendoza Uribe. Il a perdu une soeur sous les
décombres. "Nous avons des centaines de morts et des milliers de blessés.
Même des édifices publics et des banques se sont effondrés.
Nous sommes sans eau et sans électricité. Nous avons besoin
d'aliments de première nécessité, de groupes électrogènes,
de médecins et d'infirmières" disait le maire aux journalistes,
jeudi matin après une première nuit dans les ruines de sa ville
désormais fantôme.
Soixante-dix km plus au sud et à 310 km de Lima, la ville d'Ica, 290.000
habitants, est la plus touchée après Pisco. Le président
Garcia a décrété l'état d'urgence pendant 60
jours dans les cinq provinces de la région d'Ica (elle porte le nom
de son chef-lieu et englobe Pisco), ainsi que dans la province de Cañete, la plus méridionale
de la région de Lima. L'état des édifices publics
et des écoles doit y être examiné.
Le tremblement de terre a rasé comme des châteaux de cartes des
milliers de maisons aux murs en adobes, ces briques d'argiles non cuites
séchées au soleil. Il a aussi endommagé ou détruit au moins 39
établissements scolaires, 12 hôpitaux ou dispensaires, 14 tronçons de routes et 6
églises. Celle de San Clemente, à Pisco, s'est
effondrée sur plus de 200 fidèles qui assistaient mercredi
soir à une messe de... funérailles. Les sauveteurs devraient
dégager là plusieurs dizaines de victimes mortelles, encore
en nombre indéterminé.
Dans le conglomérat de 8,5 millions d'habitants que forment la capitale,
Lima, et la ville portuaire proche de Callao les édifices ont tangué
sans s'effondrer, perdant parfois des éléments de façade
et de toit. Les occupants ont couru vers des zones non bâties.
La "suspension des activités du Congrès pour dommages dans
sa structure" a été annoncée par Luis Gonzales Posada,
président de ce Parlement monocaméral péruvien.
L'hiver austral fait descendre à moins de dix degrés la température
nocturne à Ica et Pisco, mais les sinistrés et ceux qui redoutent de nouveaux
tremblements de terre dorment dans les rues. Les couvertures, trop rares, vont en priorité
aux enfants. Des braseros sont allumés. On vient s'y réchauffer entre deux tranches
de sommeil, évitant parfois de piétiner des cadavres en mal
de cercueil.
"Nous voulons de l'eau et des cercueils" a crié vendredi la foule
au président Garcia qui évaluait sur place la situation à
Pisco, ville qui "semble avoir été bombardée" selon Luis Gonzales Posada.
"Personne ne mourra de faim ni de soif" s'est cru obligé
d'affirmer le chef de l'Etat. Il a prédit que "la situation tendrait
à revenir à la normale" dans les dix jours.
Mais pour des dizaines de milliers de sinistrés qui ne possèdent
plus rien, dix jours sont une éternité. Les dégâts
sur la route panaméricaine retardent l'aide humanitaire. Des multitudes
se bousculent lorsque des soldats lèvent la bâche d'un camion
militaire pour distribuer des bouteilles d'eau. Des témoins affirment
qu'on pille désormais simplement pour boire et manger. L'insécurité
s'installe. Pour comble, le séisme a éventré la prison de
Tambo de Mora, dans la province de Chincha (région d'Ica) et 680
détenus se sont éparpillés dans la nature.
La marine prépare l'envoi vers Pisco d'un navire hôpital et
de deux bateaux chargés d'eau potable. Il faut aussi coordonner l'aide
en hommes et matériel qui arrive de divers pays d'Europe et des Amériques.
Une chance: l'aéroport de Pisco reste utilisable.
Le défi que doit désormais relever le président Alan
Garcia est d'éviter une catastrophe humanitaire qui aurait rapidement des
conséquences politiques. D'autant plus que le Pérou est bordé
au nord et au sud par deux pays, l'Equateur et la Bolivie, passés dans
l'orbite bolivarienne du président vénézuélien
Hugo Chavez.
Près de la moitié, 48%, des 27,5 millions de Péruviens
vit sous le seuil de pauvreté et 68% de la population en âge
de travailler est sans emploi (8%) ou sous-employée (60%).
|
|
Presse de Lima du 17 août 2007 -El Comercio: "C'est l'heure de l'action et de la solidarité entre Péruviens" -La República: "Plus de 500 morts. La furie s'est acharnée sur Pisco".
|
version imprimable
Vous pouvez réagir à cet article sur notre forum
ARTICLES ET DOSSIERS LIÉS
Séisme : la photo de Chavez politise le drame et les sinistrés déblaient
Dossier Pérou
Dossier Société
Defensa civil (de Perú)
|
|