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Crise après la révocation de la médiation du président du Venezuela
Colombie / Betancourt / otages : Chavez juge "grave" la "trahison" d'Uribe
CARACAS / BOGOTA, samedi 24 novembre 2007 (LatinReporters.com) - "J'ai perdu confiance et cela est
grave pour les relations bilatérales... Je me sens trahi dans ma bonne foi.
Uribe a rompu un engagement en violant la confiance, car il devait m'appeler pour éclaircir ce
qui s'est passé" a déclaré, samedi à 2h du matin sur la chaîne
publique Venezolana de Television, le président
vénézuélien Hugo Chavez. Son homologue colombien Alvaro
Uribe l'a déchargé mercredi de sa mission de médiateur
avec les FARC visant à la libération d'Ingrid Betancourt et d'autres
otages de cette guérilla.
Les présidents vénézuélien Hugo Chavez (à gauche) et colombien Alvaro Uribe, le 31 août 2007 dans l'hacienda présidentielle colombienne d'Hato Grande. La médiation avec les FARC était alors confiée à Chavez. Photo César Carrión - SP
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En guerre intérieure depuis plus de 40 ans contre les insurgés
marxistes des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie),
le pays d'Alvaro Uribe est armé par Washington. Hugo Chavez, lui,
au nom de la résistance contre une éventuelle attaque des Etats-Unis,
se renforce par l'achat massif de corvettes, sous-marins, hélicoptères,
avions de chasse, systèmes anti-aériens et fusils d'assaut
via des contrats conclus ou en négociation avec notamment la Russie,
la Biélorussie et l'Espagne.
Au-delà du dossier des otages, c'est donc une inquiétude pour
la paix régionale que peut faire fait planer le mot "grave" appliqué
par Hugo Chavez aux relations entre deux grands pays sud-américains
surarmés qui partagent 2.219 km de frontière commune.
D'autant plus qu'un vieux différend frontalier oppose la Colombie
et le Venezuela dans la région de La Guajira, en bordure du lac de Maracaibo,
où est extraite la majeure partie du pétrole
vénézuélien.
Le général à la retraite Fernando Ochoa, successivement
ministre de la Défense et des Relations extérieures du Venezuela
sous la présidence du social-démocrate Carlos Andres Perez
(destitué en 1993 pour malversation de fonds publics), estimait en
juillet dernier que le réarmement vénézuélien
rend "très crédible" un conflit prochain avec la Colombie,
qui permettrait à Chavez d'étouffer plus facilement l'opposition
interne à la radicalisation de son socialisme bolivarien.
Au risque de heurter de légitimes sensibilités et d'encourir
l'excommunication de l'Eglise Ingridiste dont le président français
Nicolas Sarkozy est désormais le pape européen, force est de
constater qu'on n'a donc pas fini de s'interroger sur les conséquences
possibles de l'imprudence courageuse d'Ingrid Betancourt, dans la mesure
où surtout elle et d'autres otages aux mains de la guérilla contribueraient,
malgré eux et fût-ce partiellement, à une crise "grave"
entre Bogota et Caracas. La Franco-Colombienne était en campagne électorale,
briguant la présidence de la Colombie, lorsqu'elle fut séquestrée
le 23 février 2002 par les FARC sur une route du Sud colombien que
l'armée, à hauteur de barrages préventifs, lui avait
pourtant déconseillé d'emprunter à cause de la présence
de guérilleros.
Selon Bogota, c'est pour avoir contacté sans autorisation à
propos des otages le chef de l'armée colombienne, le général
Mario Montoya, que Hugo Chavez a été relevé le 21 novembre
de sa médiation avec les FARC, confiée fin août par
Alvaro Uribe. Ce dernier, au sommet ibéro-américain de Santiago
du Chili conclu le 10 novembre, avait expressément invité le
président Chavez à ne pas "entrer directement en communication
avec le haut commandement institutionnel de la Colombie".
La correspondante à Bogota du journal espagnol de centre gauche El
Pais affirme qu'Uribe montra alors à Chavez des photos prises par
satellite d'un camp des FARC au Venezuela, dans la région montagneuse
de Perija.
La Colombie avait déjà marqué fermement son opposition
à des ingérences non autorisées en expulsant des Vénézuéliens qui faisaient campagne pour des candidats séduits par le socialisme bolivarien dans le cadre des élections municipales et régionales
colombiennes d'octobre dernier.
Hugo Chavez a néanmoins attribué samedi la fin de sa médiation
décidée par la Colombie à "d'énormes pressions"
de "l'extrême droite", de Washington et, éventuellement, de
militaires colombiens. Il a aussi menacé de "dire des choses", se
référant sans doute à des aspects réservés
de la mission que lui avait confiée Alvaro Uribe. Le président
français Nicolas Sarkozy, qui a lui aussi des contacts réservés
avec Hugo Chavez, dont il souhaite la reprise de la médiation, est
ainsi prévenu que le secret diplomatique n'est que relatif aux yeux
du chef de l'Etat vénézuélien.
Paradoxalement, la soudaine crise entre la Colombie et le Venezuela ouvre
une large fenêtre sur l'espoir. Interpellant à nouveau virtuellement et
en le tutoyant sur la Venezolana de Television le chef suprême présumé
des FARC, le patriarche Manuel Marulanda (invisible depuis 2002), Hugo Chavez,
comme si sa médiation se poursuivait, l'a invité une fois
de plus samedi à envoyer à Caracas les preuves de vie
tant réclamées d'Ingrid Betancourt et d'autres otages de la
guérilla. "Et si tu veux en libérer un groupe ou tous, ils
seront les bienvenus" a ajouté le président vénézuélien.
Quelques heures auparavant, devant les membres du Parlement latino-américain
réunis à Bogota, le président colombien Alvaro Uribe
affirmait que "si les terroristes [des FARC] libèrent unilatéralement
les séquestrés en les remettant au président Chavez,
de la République bolivarienne soeur du Venezuela, ou au président
Sarkozy de France ou à la Croix-Rouge internationale ou que simplement
ils les libèrent, le gouvernement de la Colombie dit d'avance: bienvenue
soit cette libération".
Selon le ministre colombien de la Défense, Juan Manuel Santos, qui
rencontrait la presse vendredi à l'ambassade de Colombie à
Londres, l'échange d'otages des FARC contre des guérilleros
emprisonnés "peut se faire très rapidement, même par
téléphone", à condition que les insurgés "en
aient la volonté".
En conséquence, reporter sur les FARC la pression diplomatique et
médiatique exercée sur le président Uribe (qui n'est
pas le ravisseur et dont la popularité intérieure est remontée depuis juillet de
66 à 78%) serait peut-être particulièrement judicieux
dans les circonstances actuelles. On verrait alors si l'échange humanitaire
de prisonniers importe plus aux rebelles que leur objectif politique de reconnaissance
internationale soutenu par leur chantage sur le sort de leurs otages.
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