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1er article du Lider Maximo en 8 mois d'hospitalisation - Texte intégral
Cuba - Fidel Castro contre les biocarburants de George W. Bush
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Hospitalisé, Fidel Castro (à gauche) reçoit à La Havane le président vénézuélien Hugo Chavez (29 janvier 2007) - Photo Granma / Estudios Revolución | |
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LA HAVANE, vendredi 30 mars 2007 (LatinReporters.com)
- Fidel Castro, 80 ans et demi, reprend-t-il progressivement les rênes du pouvoir ou
pour le moins veille-t-il à nouveau de près sur les grandes
orientations du régime communiste cubain? Il a publié jeudi
son premier article depuis son hospitalisation, le 27 juillet 2006, critiquant
les projets de biocarburants du président américain George
W. Bush.
Signé le 29 mars à la une du quotidien Granma, organe du Comité
Central du Parti communiste de Cuba, l'article met en garde contre les conséquences
catastrophiques qu'aurait, selon le président Castro, la production
de carburants verts à partir de cultures en principe alimentaires.
A cet égard, les Etats-Unis sont désignés dans
l'article comme les responsables potentiels de la "mort prématurée"
de milliards de personnes que pourrait menacer la famine. Néanmoins,
le réchauffement planétaire, la flambée des prix du
pétrole et les risques d'une trop forte dépendance à
l'égard des grands exportateurs d'hydrocarbures incitent, au-delà
des Etats-Unis, de nombreux pays à se tourner vers les biocarburants.
Le Brésil, pionnier en ce domaine, et son président de centre
gauche Luiz Inacio Lula da Silva ont scellé avec le président
Bush, le 9 mars dernier à Sao Paulo, un partenariat pour développer
la production et l'utilisation de biocarburants, surtout l'éthanol.
Ce partenariat est ouvert à d'autres pays latino-américains.
Brésil et Etats-Unis, qui contrôlent plus de 70% de la production mondiale
d'éthanol, se retrouvent encore, sous l'égide des
Nations Unies, au sein d'un Forum international des biocarburants incluant
aussi la Chine, l'Inde, l'Afrique du Sud et l'Union européenne.
Jusqu'en 2008, ce Forum se penchera notamment sur l'élaboration
de standards internationaux pour l'utilisation de biocombustibles comme énergie
de substitution partielle du pétrole.
Et le 9 mars à Bruxelles, les 27 chefs d'Etat et de gouvernement
de l'Union européenne fixaient le quota d'utilisation des biocarburants à
un minimum de 10% en 2020 dans le secteur des transports.
Voici le texte intégral de l'article de Fidel Castro (traduction
Granma International / Latin Reporters):
(Granma - 29 mars 2007)
Réflexions du Commandant en Chef
Plus de trois milliards de personnes condamnées à
mourir prématurément de faim ou de soif dans le monde
Cette estimation n’a rien d’exagéré, elle est plutôt
conservatrice. J’y ai longuement réfléchi après la réunion
qu’a eue le président Bush avec les fabricants nord-américains
d’automobiles.
L’idée sinistre de transformer des aliments en carburant est devenue
une grande ligne économique de la politique extérieure des Etats-Unis
ce lundi 26 mars.
Une dépêche de l’AP, une agence dont les informations circulent
partout dans le monde, indique textuellement :
« WASHINGTON, le 26 mars (AP) — Le président George W. Bush s’est
félicité ce lundi des avantages qu’offrent les automobiles consommant
de l’éthanol ou du biodiesel, au cours d’une réunion avec des
représentants de l’industrie automobile organisée pour l’étude
et la mise en oeuvre de ses plans de production de carburants alternatifs.
Bush a dit que si les leaders de l’industrie automobile s’engageaient à
doubler la production de véhicules à carburant alternatif, cela
encouragerait les automobilistes à abandonner les moteurs à
essence et, par voie de conséquence, la dépendance du pays vis-à-vis
des importations de pétrole s’en trouverait réduite.
«Ceci constitue un progrès technologique important
pour le pays», a dit Bush après avoir inspecté
trois véhicules à carburant alternatif. Si la nation se propose
de réduire sa consommation d’essence, il faut mettre le consommateur
en mesure de prendre une décision rationnelle.
Le président a invité le Congrès à examiner rapidement
une loi proposée récemment par l’exécutif pour ordonner
la consommation de 132 milliards de litres (35 milliards de gallons) de carburant
alternatif pour 2017 et imposer des normes plus exigeantes d’économie
de carburant pour les voitures.
Bush a eu une réunion avec le président du conseil et directeur
général de General Motors Corp, Rich Wagoner; le directeur général
de Ford Motor Co., Alan Mulally, et le directeur général du
groupe Chrysler de Daimler Chrysler AG, Tom LaSorda.
Les participants à la rencontre se sont penchés sur les mesures
à prendre pour soutenir la production de véhicules à
carburant alternatif, développer la production d’éthanol à
partir du gazon ou de la sciure, et étudier une proposition pour réduire
de 20% la consommation d’essence en l’espace de dix ans.
Les conversations ont eu lieu au moment où le prix de l’essence montait.
L’étude la plus récente de l’organisation Lundberg Survey signalait
que le prix moyen de l’essence avait augmenté de 6 cents par gallon
(3,78 litres) ces deux dernières semaines sur le marché national,
atteignant 2,61 dollars.»
J’estime que la réduction et le recyclage de tous les moteurs qui
consomment de l’électricité et du carburant constitue un impératif
élémentaire et urgent pour toute l’humanité. La tragédie
ne tient pas à la réduction de ces dépenses d’énergie
mais au projet de transformer des aliments en carburant.
On sait aujourd’hui, en toute précision, qu’une tonne de maïs
donnera en tout et pour tout 413 litres (ou 109 gallons) d’éthanol
en moyenne, avec des variations selon la densité.
Le prix moyen du maïs dans les ports des Etats-Unis se monte à
167 dollars la tonne. Il faudrait 320 millions de tonnes de maïs pour
produire 35 milliards de gallons d’éthanol.
Selon des données de la FAO, la récolte de maïs des Etats-Unis
pour 2005 a été de 280,2 millions de tonnes.
Le président a beau parler de produire du carburant à partir
de gazon ou de sciure, il est clair que cette perspective est totalement dépourvue
de réalisme. Trente-cinq milliards, pour ceux qui ne s’en rendraient
pas compte, c’est trente-cinq, suivi de neuf zéros.
On verra ensuite venir de magnifiques exemples de productivité par
homme et par hectare, donnés par les agriculteurs expérimentés
et bien organisés des Etats-Unis : le maïs transformé en
éthanol, les résidus de ce maïs transformés en
fourrage pour le bétail, avec 26% de protéines, et les excréments
du bétail utilisés comme matière première pour
la production de gaz. Mais naturellement tout ceci ne pourra intervenir qu’après
des investissements considérables qui ne seront à la portée
que des entreprises les plus puissantes, pour lesquelles tout fonctionne à
partir de la consommation d’électricité et de combustibles.
Appliquez la recette aux pays du tiers monde et vous verrez combien de personnes
cesseront de consommer du maïs parmi les populations affamées
de notre planète. Ou pire encore : octroyez des prêts financiers
aux pays pauvres pour produire de l’éthanol de maïs ou de tout
autre denrée alimentaire et il ne restera plus un seul arbre pour
protéger l’humanité du changement climatique.
D’autres pays du monde riche envisagent d’utiliser non seulement du maïs,
mais aussi du blé, des graines de tournesol, du colza et d’autres aliments
pour en faire des carburants. Pour les Européens, par exemple, ce
serait une bonne affaire d’importer tout le soja du monde pour réduire
les dépenses de leurs automobiles en carburants et alimenter leur bétail
avec les résidus de cette légumineuse, spécialement riche
en toutes sortes d’acides aminés essentiels.
A Cuba, les alcools étaient tirés des sous-produits de l’industrie
sucrière, après extraction, par trois fois, du jus de canne.
Le changement de climat affecte déjà notre production sucrière.
De grandes sécheresses alternent avec des pluies record, qui permettent
à peine de produire du sucre durant cent jours avec des rendements
convenables pendant les mois de notre hiver très doux, de sorte qu’il
nous manque du sucre par tonne de canne ou il nous manque de la canne par
hectare à cause des sécheresses prolongées durant les
mois de semailles et de culture.
Au Venezuela, je crois savoir que l’alcool ne sera pas destiné à
l’exportation, mais à l’amélioration de la qualité environnementale
de leur propre combustible. C’est pourquoi, indépendamment de l’excellente
technologie brésilienne de production d’alcool, à Cuba l’emploi
d’une telle technologie pour la production directe d’alcool à partir
du jus de canne ne serait qu’un rêve ou une extravagance de la part
de ceux qui se laissent bercer par cette idée. Dans notre pays, les
terres consacrées à la production directe d’alcool peuvent être
beaucoup plus utiles pour la production d’aliments pour le peuple et pour
la protection de l’environnement.
Tous les pays du monde, riches et pauvres, sans aucune exception, pourraient
économiser des milliards de dollars en investissement et combustible
en remplaçant simplement toutes les ampoules incandescentes par des
ampoules fluorescentes, ce qui est chose faite à Cuba dans tous les
foyers du pays. Cela signifierait un répit pour résister au
changement climatique sans faire mourir de faim les populations pauvres du
monde.
Comme on peut le voir, je n’utilise aucun adjectif pour qualifier le système
et les maîtres du monde. Cette tâche est du ressort des experts
en information et des spécialistes honnêtes en sciences sociales,
économiques et humaines qui abondent dans le monde et qui, constamment
et avec talent, se penchent sur le présent et l’avenir de notre espèce.
Il leur suffit d’un ordinateur et d’un nombre croissant de réseaux
d’Internet.
Nous connaissons aujourd’hui pour la première fois une économie
réellement globalisée et une puissance dominante dans le domaine
économique, politique et militaire, qui n’a rien à voir avec
la Rome des empereurs.
Certains se demanderont pourquoi je parle de la faim et de la soif. Je réponds
: il ne s’agit pas du revers de la médaille, mais de plusieurs faces
d’une autre pièce, à l’image d’un dé à six faces,
ou d’un polyèdre avec beaucoup plus de faces.
J’ai recours dans ce cas à une agence officielle d’information, fondée
en 1945 et généralement bien informée sur les problèmes
économiques et sociaux dans le monde : la TELAM. Je cite, textuellement
:
« Près de deux milliards de personnes habiteront dans un délai
d’à peine 18 ans dans des pays et des régions où l’eau
ne sera plus qu’un lointain souvenir. Deux tiers de la population mondiale
pourraient vivre dans des lieux où cette pénurie pourrait déboucher
sur des tensions sociales et économiques de telle ampleur qu’elles
pourraient entraîner des peuples dans des guerres pour l’«or bleu»,
devenu l’objet de toutes les convoitises.
Durant les cent dernières années, l’utilisation de l’eau a
augmenté à un rythme plus de deux fois supérieur au
taux d’accroissement de la population.
Selon les statistiques du Conseil mondial de l’Eau (WWC, selon son sigle
en anglais), on estime que vers 2015 le nombre d’habitants touchés
par cette grave situation pourrait atteindre 3 milliards 500 millions de personnes.
L’Organisation des Nations Unies a célébré le 23 mars
la Journée mondiale de l’eau, appelant à affronter dès
maintenant la pénurie mondiale d’eau sous l’égide de l’Organisation
des Nations Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation (FAO), dans le but
de souligner l’importance croissante du problème et la nécessité
d’une meilleure intégration et coopération permettant de garantir
une gestion soutenue et efficace des ressources hydrauliques.
De nombreuses régions de la planète souffrent d’une sévère
pénurie d’eau, avec moins de 500 mètres cubes par personne
et par an. De plus en plus de régions sont touchées par la
pénurie chronique de cet élément vital.
Les principaux effets de ce phénomène sont l’insuffisance de
ce précieux liquide pour la production d’aliments, l’impossibilité
du développement industriel, urbain et touristique et les problèmes
de santé. »
Ici s’achève la dépêche de TELAM.
Je n’ai pas parlé ici d’autres faits importants, comme la fonte des
glaciers au Groenland et dans l’Antarctique, la destruction de la couche d’ozone
et la croissance de la quantité de mercure dans de nombreuses espèces
de poissons de consommation courante.
D’autres sujets pourraient être abordés, mais je me propose
simplement, dans ces quelques lignes, de commenter la réunion du président
Bush avec les principaux acteurs de l’industrie automobile nord-américaine.
Fidel Castro
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