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Espagne - ETA : état des lieux, état des forces
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"La paix, c'est la Constitution" est l'une des devises de l'association Foro Ermua présidée par le professeur Buesa, tenant ici un discours public le 6 décembre 2006 dans la ville basque de Vitoria © Asociación Foro Ermua |
par Jean Chalvidant (*)
www.chalvidant.info
Lundi 29 janvier 2007 (LatinReporters.com) - Les travaux de Mikel Buesa,
professeur à l'Universidad Complutense de Madrid et animateur de l’Observatoire
de vérification de la violence terroriste, dissèquent les actions
de l'organisation séparatiste basque ETA et de son entourage. Sa dernière
livraison, couvrant les 9 mois de la trêve en trompe l’œil, de mars
à décembre 2006, est révélatrice du marché
de dupes imposé par la bande.
Ce sont ces chiffres, incontournables, et ses conclusions qui à l’avenir
devront être pris en compte par les chercheurs et les historiens. En
voici les points principaux.
À aucun moment, ETA n’a baissé la garde. Ainsi l’impôt
révolutionnaire a-t-il continué à être perçu
auprès des hommes d’affaires basques et navarrais. Six vagues de lettres
ont été envoyées à environ 300 chefs d’entreprise,
exigeant une somme allant de 18.000 à 100.000 euros. Bénéfice
engrangé: 1.350.000 euros.
De même la kale borroka, la violence des rues, n’a-t-elle jamais cessé.
Alors qu’elle s’élevait en 2004 à 19,6 actions par mois, elle atteint 31,5 l’année
suivante et 28,8 en 2006 (259 actes). Les dégâts se montent
pour les 9 mois à 2.428.800 euros. Et complaisance des autorités,
la police basque, l’Ertzaintza, n’a procédé qu’à… 17
arrestations, dont aucune au premier trimestre, avant l’annonce de la trêve
le 22 mars.
Constat similaire pour le réarmement: en 2006, l’organisation a volé
en France 68 véhicules, dont 50 pendant la trêve. L’assaut d’une
armurerie lui a rapporté 344 pistolets, sans compter les munitions
et les pièces de rechange. À partir de septembre, elle a testé
de nouvelles bombes ventouses et s’est procuré du matériel
électronique servant à faire exploser à distance des
bombes. ETA disposerait d’environ 5,3 tonnes d’explosifs divers (chlorate
sodique et poudre d’aluminium), de 20.000 passeports ou carnets véritables
et du matériel pour y inclure de fausses identités, de deux
machines pour fabriquer des plaques minéralogiques, de 30.000 plaques
déjà embouties.
Les moyens matériels ne font pas tout. Alors qu’à l’automne
dernier la bande était exsangue et forte d’environ 150 militants,
elle pourrait dorénavant compter sur 516 hommes, disséminés
en majorité sur le sol français. La majorité inexpérimentés,
certes, mais plus déterminés que jamais, car persuadés
que c’est le gouvernement de Madrid qui est le responsable de l’échec
des négociations, et, plus encore, de l’éloignement de leurs
rêves : la libération des prisonniers, le référendum
d’autodétermination, l’indépendance.
Depuis la publication des résultats de l’Observatoire, la situation
ne s’est guère améliorée : à Gérone a
été arrêté le "libéré" (c’est-à-dire
fiché par la police et rétribué par ETA) Iker Aguirre,
chargé de préparer un attentat à Valence, où
se tiendra la Coupe America de voile. Les services sont convaincus que les
jeunes recrues ont reçu des cours portant sur l’utilisation d’un nouvel
explosif concocté par les artificiers étarres, l’ "anfoal",
qui ne tardera pas à être employé. Quant aux 344 pistolets
volés, ils auraient été répartis en trois tiers:
un vers les commandos installés en Espagne, un (les Smith&Wesson
38 mm peu prisés par les terroristes) vers le marché noir pour
gonfler la cagnotte et un disséminé dans plusieurs planques,
en France.
Conclusion des experts : ETA commettra un attentat avant les élections
municipales et régionales de mai prochain. Conclusion de Zapatero,
le président du gouvernement socialiste espagnol: "Nous sommes peut-être
dans la phase finale d’ETA". Comme quoi l’angélisme a ses limites.
(*) Docteur en Civilisation espagnole, Jean Chalvidant est le spécialiste de l’Espagne et de
l’Amérique latine au MCC, le département de recherche sur les Menaces Criminelles
Contemporaines (Institut de criminologie/Université Paris II Panthéon-Assas).
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