MADRID, vendredi 31 juillet 2009 (LatinReporters.com) -
Les attentats contre la garde civile à Burgos (65 blessés
légers) et le lendemain près de Palma de Majorque (2 morts) ont marqué
mercredi et jeudi le 50e anniversaire de la création de l'organisation
indépendantiste basque ETA. Sa victoire militaire sur l'Espagne est
impossible. Mais les pistoleros séparatistes espèrent que la
répétition de leurs frappes terroristes incitera à nouveau
Madrid à négocier la paix et à en payer le prix.
Trois fois déjà au cours des vingt dernières années,
les attentats de l'ETA, qui ont fait 828 morts et des milliers de blessés, ont incité des gouvernements espagnols successifs
à s'asseoir à la table de négociation. Les ultimes pourparlers,
frustrés en 2007, avaient été ouverts par l'actuel président
du gouvernement espagnol, le socialiste José Luis Rodriguez Zapatero.
Ses deux prédécesseurs, le conservateur José Maria Aznar
en 1999 et le socialiste Felipe Gonzalez en 1989, négocièrent
également en vain.
La reconnaissance du droit des Basques à l'autodétermination
et l'ouverture d'un processus qui rattacherait progressivement la Navarre
au Pays basque sont les deux revendications essentielles maintenues par
l'ETA lors de toutes les négociations. Droit à l'autodétermination
ne signifie pas automatiquement indépendance. Lors d'un référendum
qui concrétiserait l'exercice de ce droit, une majorité de
Basques pourrait en effet rejeter la séparation au profit, par exemple,
d'un élargissement de l'actuelle autonomie régionale. Le cas
échéant, les Navarrais auraient eux aussi le droit de se prononcer
sur leur sort. Même les terroristes en conviennent.
Selon l'ETA, les contacts exploratoires avec les socialistes de l'équipe
de M. Zapatero auraient débuté discrètement avant même
son arrivée au pouvoir comme vainqueur des législatives de
mars 2004. Contrairement aux émissaires de M. Aznar, ceux de M. Zapatero
auraient, toujours selon l'ETA, largement débattu avec les séparatistes, sans arriver à
un accord, du droit à l'autodétermination et d'une territorialité
basque débordant du cadre de l'actuelle région autonome. [Cf. Article du 02.02.2008
"
Négociation politique ou non avec l'ETA?"]
Le leader socialiste offrit en outre aux indépendantistes une respectabilité
internationale inédite quoique passagère, faisant voter le
25 octobre 2006 au Parlement européen, par 321 oui contre 311 non
et 24 abstentions, une résolution appuyant les négociations
alors en cours entre Madrid et l'ETA. [Cf. Article du 26.10.2006
"
Négocier avec l'ETA: Zapatero divise autant l'Europe que l'Espagne"]
Aussi, malgré ses promesses de prison à vie pour les terroristes et de prochaine "victoire
définitive de la loi et de la liberté" répétées jeudi après
les attentats de Burgos et de Majorque, le socialiste José Luis Rodriguez
Zapatero demeure-t-il aux yeux de l'ETA la maille la plus faible jamais décelée
par les indépendantistes sur l'armure de l'Espagne. Cela les porte
malheureusement à ne pas lâcher pareille proie, à continuer
de frapper pour tenter de forcer de nouveaux pourparlers peut-être enfin victorieux, malgré l'unité
antiterroriste retrouvée entre la gauche et la droite espagnoles,
malgré aussi l'efficacité sans précédent de la
collaboration policière hispano-française.
A propos de cette efficacité, qui a fait tomber ces derniers mois plusieurs chefs successifs
de l'ETA, elle épargne étrangement José
Antonio Urrutikoetxea Bengoetxea, alias Josu Ternera, leader suprême
de l'organisation séparatiste au moment des premiers pourparlers avec
l'équipe de M. Zapatero. Dans une clandestinité apparemment
non perturbée, est-il tenu en réserve par Madrid et Paris pour
réapparaître au moment politiquement opportun comme négociateur
d'une ETA plus encline à la modération?
Dans l'immédiat, comme l'annonçaient le 25 mai dernier au journal
basque Gara deux pistoleros encagoulés, l'offensive terroriste remet
"le problème [basque] et sa gravité au centre de l'agenda politique".
Annonçant la définition, "avant l'été", d'une
"stratégie politico-armée efficace", les deux etarras soulignaient
alors la nécessité, selon eux, d'une "force suffisante
pour faire mal à l'ennemi ... et entendre [les dirigeants espagnols]
parler une fois de plus de dialogue et de paix.".
Enfonçant le même clou, le quotidien Gara écrit que pour la
gauche "abertzale" ("patriote"), soit les 10% de Basques qui soutiennent
encore l'ETA, les derniers attentats de Burgos et de Majorque démontreraient
"l'irresponsabilité absolue de tous les secteurs politiques et médiatiques
qui continuent d'insister sur la possibilité d'une victoire policière
sur l'ETA" au lieu de rouvrir "une dynamique de dialogue et de négociation".