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Les facilités militaires octroyées aux Etats-Unis par Bogota continuent à faire des vagues au Venezuela
"Menaces de guerre" de Chavez : la Colombie va saisir l'ONU et l'OEA

Hugo Chavez, président du Venezuela. Discours belliqueux peut-être à usage interne, mais avec risque de dérapage international. (Photo Marcelo Garcia, Prensa Presidencial)

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CARACAS / BOGOTA, lundi 9 novembre 2009 (LatinReporters.com) - "Face aux menaces de guerre proférées par le gouvernement du Venezuela, le gouvernement de la Colombie se propose de recourir à l'Organisation des Etats américains et au Conseil de sécurité des Nations unies". La présidence de la République colombienne répondait ainsi, au soir du 8 novembre dans un communiqué, à l'ordre de "se préparer à la guerre" donné le même jour par le président vénézuélien Hugo Chavez aux militaires de son pays, priés "d'entraîner" aussi les civils.

"Compagnons militaires, ne perdons pas un jour pour notre mission fondamentale, nous préparer à la guerre et aider le peuple à se préparer à la guerre, c'est une responsabilité de tous", a affirmé en kaki militaire l'ex-lieutenant colonel putschiste Hugo Chavez, président élu du Venezuela depuis 1999. Il s'exprimait lors de son émission dominicale "Alo Presidente", que télévisions et radios vénézuéliennes sont contraintes, sous peine de sanctions, de diffuser intégralement et en direct.

"Formons les corps de miliciens, entraînons-les, les étudiants révolutionnaires, qui sont majoritaires, les travailleurs, les femmes, tous prêts à défendre cette patrie sacrée appelée Venezuela" ajoutait Chavez en présence notamment de chefs des trois armes qui acquiesçaient au garde-à-vous.

"Se préparer à la guerre est la meilleure manière de l'éviter" a estimé Hugo Chavez. Il conférait ainsi un caractère préventif à son ordre de mobilisation, néanmoins interprété comme une menace par la Colombie voisine.

Il s'agirait, selon le leader du socialisme dit bolivarien, d'être prêt à repousser une éventuelle agression des Etats-Unis à partir de la Colombie. Hugo Chavez considère en effet que la signature, en octobre, d'un accord américano-colombien permettant à l'armée américaine de faire usage d'au moins sept bases colombiennes est une menace directe pour le Venezuela, pour son pétrole et sa "révolution", ainsi que pour les gouvernements de gauche d'Amérique latine.

Depuis que le projet d'accord a été rendu public, en juillet, le Venezuela a gelé ses relations diplomatiques avec la Colombie, réduit les échanges commerciaux bilatéraux et renforcé sa présence militaire dans les zones stratégiques des 2.219 km de frontière commune.

Washington et Bogota affirment que leur nouvel accord se limiterait à actualiser leur coopération contre le trafic de drogue et les guérillas d'extrême gauche en vigueur depuis 1999 dans le cadre du Plan Colombie, lancé à l'époque par le président américain Bill Clinton. Le chef de l'Etat colombien, le président conservateur Alvaro Uribe, assimile cette coopération avec les Etats-Unis à une nécessaire et légitime défense, d'autant que le Venezuela se réarme massivement depuis plusieurs années et qu'aucun pays d'Amérique latine ne contribue à la lutte contre les guérillas colombiennes. Elles disposent même de bases de repli et d'entraînement dans deux pays voisins de la Colombie, le Venezuela et l'Equateur.

Paraphrasant son ami cubain Fidel Castro, Hugo Chavez a estimé dans son "Alo Presidente" que les Etats-Unis ont "annexé" la Colombie, que "le gouvernement colombien, transféré aux Etats-Unis, n'est plus à Bogota" et que "les militaires yankees peuvent être à leur aise en Colombie, comme s'il s'agissait d'un Etat de l'Union".

Hugo Chavez a interpellé le président américain Barack Obama, l'invitant "à ne pas se tromper en donnant l'ordre d'une agression ouverte contre le Venezuela via la Colombie ... Nous sommes prêts à tout. Le Venezuela ne sera jamais une colonie yankee ni de personne".

"Si les Etats-Unis agressent militairement le Venezuela, la guerre de 100 ans commencera et elle s'étendra sur l'ensemble du continent", car "le Venezuela n'est pas seul; nous avons un grand groupe d'amis" a averti le président vénézuélien.

Réactions : discours guerrier pour camoufler la situation interne?

Parallèlement à son intention de saisir l'ONU et l'OEA, la Colombie a réitéré dans son communiqué présidentiel sa "disposition au dialogue franc" avec le Venezuela. A cet égard, le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva s'est offert la semaine dernière comme éventuel médiateur, proposant d'organiser une prochaine rencontre entre les présidents Chavez et Uribe.

Camilo Reyes, ex- ministre colombien des Relations extérieures, croit que par son discours guerrier "le président Chavez cherche à camoufler la difficile situation interne" du Venezuela. Les observateurs relèvent à ce propos qu'à 10 mois de leurs élections législatives de septembre 2010, les Vénézuéliens sont harcelés notamment par des pénuries d'eau, d'électricité et de certains aliments, par une criminalité galopante qui frôlera les 20.000 meurtres en 2009 (contre plus de 14.000 en 2008) et par une inflation chiffrée déjà à 20,7% pour les dix premiers mois de cette année.

Hugo Chavez recourt à "une tactique de manuel pour unir le pays et justifier une militarisation de départements frontaliers [de la Colombie, ceux de Tachira et de Zulia; ndlr] aux mains de gouverneurs de l'opposition" écrit pour sa part à Caracas l'analyste Tulio Hernandez dans l'influent quotidien d'opposition El Nacional. D'autres analystes vont jusqu'à redouter que dans le climat actuel les adversaires du régime soient bientôt déclarés traîtres à la patrie. Lors de son "Alo Presidente", Hugo Chavez qualifiait dimanche ses opposants "d'apatrides sordides formant une 5e colonne".

A usage interne ou non, la militarisation du Venezuela et le discours belliqueux de son président accroissent les risques d'un dérapage international. Mais le président Chavez sait sans doute qu'en cas de conflit militaire avec la Colombie, sur laquelle le leader bolivarien rêve d'étendre sa "révolution", il aurait aussi pour adversaire un prix Nobel de la Paix, Barack Obama, et son armée.


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