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Dauphin du président Uribe net favori du second tour
Colombie - présidentielle: Ingrid Betancourt vote pour Santos, son libérateur

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Ingrid Betancourt et Juan Manuel Santos, alors ministre de la Défense, le 2 juillet 2008 à la base militaire de Catam (Bogota). Quelques heures plus tôt, l'armée colombienne libérait 15 otages de la guérilla des FARC, dont Ingrid, séquestrée pendant 6 ans, 4 mois et 9 jours - Photo www.cambio.com.co

BOGOTA, samedi 19 juin 2010 (LatinReporters.com) - L'ex-otage la plus célèbre de la planète, la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt, votera ce 20 juin, au second tour de l'élection du président de la Colombie, pour le conservateur Juan Manuel Santos, ancien ministre de la Défense et dauphin du président sortant Alvaro Uribe. Le choix d'Ingrid participe d'une reconnaissance tant personnelle que collective, base du triomphe attendu de Santos sur le candidat du Parti Vert, Antanas Mockus.

"Santos ou Mockus?" demande à Ingrid Betancourt, jointe par téléphone à Paris, une journaliste de la radio colombienne La FM. "J'ai beaucoup d'affinités idéologiques avec les indépendants, car c'est ma maison politique, mais je dois ma liberté à Juan Manuel Santos" répond Ingrid.

"Cela veut-il dire que vous allez voter pour Santos?" Confirmation immédiate de la Franco-Colombienne : "Oui, je vais voter pour Santos". Elle ne le précise pas, mais elle déposera sans doute son bulletin de vote à l'ambassade ou au consulat de Colombie à Paris, comme des milliers de Colombiens expatriés.

"Si José Manuel Santos est élu et vous demande de faire partie de son gouvernement, accepterez-vous ou resterez-vous en Europe?" Sans répondre non, Ingrid, semble rejeter cette éventualité : "Je suis en dehors de la politique, ... mais je peux être utile à la Colombie de l'extérieur" ...

On peut réécouter, en espagnol, ce dialogue diffusé le 15 juin sur les ondes de La FM. Quarante-huit heures plus tôt, à une semaine jour pour jour du vote décisif du 20 juin, l'armée colombienne avait plongé le pays dans l'euphorie en libérant sans la moindre perte le plus haut gradé des otages de la guérilla marxiste des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie), le général Luis Mendieta, ainsi que deux colonels et un sergent, tous quatre séquestrés par les rebelles depuis près de douze ans.

L'action s'était déroulée dans le département du Guaviare (sud-est), à 28 km exactement de l'endroit où, le 2 juillet 2008, Ingrid Betancourt, trois Américains et onze officiers et sous-officiers colombiens furent arrachés des mains des FARC par une ruse spectaculaire de l'armée colombienne (opération Jaque). Juan Manuel Santos, alors ministre de la Défense, en était l'instigateur. Il ordonna aussi le bombardement, le 1er mars 2008, d'un camp de la guérilla au nord de l'Equateur, où périrent 26 rebelles ou sympathisants, dont Raul Reyes, numéro deux des FARC honteusement courtisé par une France qui croyait à une libération négociée de la Franco-Colombienne.

Séquestrée le 23 février 2002 alors qu'elle faisait campagne comme candidate à l'élection présidentielle, otage de la guérilla pendant 6 ans, 4 mois et 9 jours, Ingrid Betancourt a été cette semaine très recherchée par des médias colombiens pour commenter le nouvel exploit de l'armée, d'autant qu'elle partagea une partie de sa captivité avec le général Mendieta.

"Je suis très émue, vraiment. Nous avons fait la fête sans arrêt depuis avant-hier, nous avons vibré, nous avons crié, nous avons sauté" confiait-elle, le 15 juin aussi par téléphone, à la station colombienne Caracol Radio. Ingrid saluait alors "l'illusion" rendue au pays par la quadruple nouvelle libération.

La Franco-Colombienne, dont le prochain livre tant attendu, intitulé "Même le silence à une fin", sera lancé mondialement le 21 septembre, reflète par ses réactions le pourquoi du triomphe attendu de Juan Manuel Santos.

Crédité dans les sondages, avant même le dernier succès de l'armée, de 61 à 66% des intentions de vote, contre un maximum de 29% à Antanas Mockus, l'ex-ministre de la Défense est perçu, autant que le très populaire président Uribe, comme l'incarnation de la politique dite de sécurité démocratique qui a acculé militairement la guérilla des FARC et réduit à néant ses espoirs de conquérir des avantages politiques par le chantage sur le sort des otages.

A tort ou à raison, les bénéfices de la sécurité semblent plus importants aux yeux de la majorité des Colombiens que de graves manquements aux droits de l'homme résorbés progressivement par le gouvernement et l'armée. L'inhumanité de la guérilla, financée par le narcotrafic et soutenue par le Venezuela, demeure, elle, constante.

Santos, en accord sur ce point avec Mockus, affirme qu'il n'acceptera aucun dialogue avec les FARC et les harcèlera tant qu'elles n'auront pas libéré tous leurs séquestrés, soit encore 19 militaires et policiers, que les rebelles qualifient d'otages "politiques", et plusieurs dizaines de civils, enlevés pour être échangés contre rançon.

Candidat du Parti social d'Unité nationale, dit Parti de l'U, et crédité le 30 mai de 46,56% des votes au premier tour de la présidentielle, contre 21,49% à Antanas Mockus, Juan Manuel Santos a bénéficié depuis, promettant un gouvernement "d'unité nationale", du ralliement de deux autres composantes de la droite colombienne, le Parti Conservateur et le parti Changement Radical, ainsi que de la majorité du Parti Libéral. Au Congrès de la République (Parlement), Santos bénéficierait théoriquement de l'appui de 232 des 268 députés et sénateurs.

Au-delà de la probable élection à la présidence du dauphin d'Alvaro Uribe, le vote que lui octroie Ingrid Betancourt est à lui seul une belle revanche. Lorsqu'Ingrid était encore captive, Santos et le président Uribe furent critiqués et vilipendés des années durant par la famille et les comités Betancourt, par la France et ses médias et par des pays latino-américains autoproclamés progressistes, le Venezuela de Hugo Chavez en tête. Au nom d'Ingrid, quoique certains étaient plutôt animés par l'idéologie, tous prônaient alors la négociation avec les FARC, pourtant déclarées terroristes par l'Union européenne et les Etats-Unis.

Mais aujourd'hui, nul ne peut encore raisonnablement miser sur le commerce politique d'otages pour influer sur la Colombie, renforcée intérieurement par son nouvel accord militaire avec Washington.

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