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Même en France, avec Ingrid Betancourt
Clameur mondiale contre les FARC: Alvaro Uribe superstar
A nouveau plus de 4 millions de manifestants en Colombie
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La photo politiquement la plus importante du 20 juillet 2008 est celle du
président colombien Alvaro Uribe (au centre, en chemise bleue) entouré
à Leticia, dans l'Amazonie colombienne, des présidents du Brésil,
Luiz Inacio Lula da Silva (à gauche en chemise blanche), et du Pérou,
Alan Garcia (veston bleu foncé). Ils sont convenus de collaborer
militairement aux frontières contre la guérilla des FARC -
Photo Mauricio Moreno / El Tiempo. |
Analyse de Christian GALLOY,
directeur de LatinReporters.com
MADRID, lundi 21 juillet 2008 (LatinReporters.com) -
Comme déjà le 4 février dernier, plus de 4 millions
de Colombiens et des centaines de milliers de citoyens de 90 villes du monde
ont réclamé dimanche la liberté des quelque 3.000 otages
encore séquestrés en Colombie par la guérilla marxiste
des FARC, ainsi que par d'autres groupes de terroristes ou de délinquants.
Acclamé même à Paris, où 10.000 manifestants entouraient
Ingrid Betancourt, le président colombien Alvaro Uribe a été,
politiquement parlant, la star de ce 20 juillet historique.
Preuve en est l'accord signé ce même 20 juillet, jour de la
fête nationale colombienne, par le président Uribe avec ses
homologues de deux grands pays voisins, le Péruvien Alan Garcia et
surtout le Brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, figure de proue la
plus respectée de la nouvelle gauche latino-américaine.
Les trois chefs d'Etat ont coprésidé le défilé
militaire à Leticia, ville de l'Amazonie colombienne où se
touchent les trois frontières. Il y ont signé l'accord coordonnant
leur combat frontalier contre le trafic d'armes, de munitions, d'explosifs
et de stupéfiants. Les militaires de Colombie, du Brésil et du Pérou
renforceront leur présence au long des autoroutes naturelles que sont les rivières
amazoniennes utilisées par la guérilla narco-marxiste
des FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) pour
s'approvisionner ou se mettre à l'abri.
La veille à Bogota, lors de ses entretiens avec le président
Lula, Alvaro Uribe avait obtenu des garanties stratégiques lui permettant
d'annoncer l'adhésion de la Colombie au Conseil de défense
sud-américain que veut lancer le Brésil dans le cadre de l'Union
des nations sud-américaines (Unasur), créée officiellement
le 23 mai dernier à Brasilia par les 12 pays du sous-continent.
Ces garanties sont la règle du consensus (permettant un éventuel
veto de la Colombie ou de tout autre pays) pour la prise de décision
au sein du Conseil de défense; la reconnaissance uniquement des forces
institutionnelles de chaque pays signataire et le rejet statutaire des groupes
pratiquant la violence, quelle que soit son origine.
Pour autant que ces garanties soient ratifiées par les autres membres
de l'Unasur, la guérilla colombienne ne pourrait plus espérer
la moindre reconnaissance institutionnelle de la part de l'un quelconque
des 12 pays d'Amérique du Sud. La France et la Suisse, ex-médiatrices inutiles et
desavouées par Bogota pour déviances pro-FARC, en prendront sans doute note.
Que ce triomphe politique soit avalisé par des icônes de la
gauche régionale telles que le président brésilien Lula
et la présidente chilienne Michelle Bachelet, consultée téléphoniquement
par MM. Lula et Uribe en sa qualité de présidente en exercice
de l'Unasur, en dit long sur la capacité de manoeuvre internationale
retrouvée par Alvaro Uribe après la libération mondialement
applaudie, le 2 juillet par l'armée colombienne, d'Ingrid Betancourt,
de trois Américains et de 11 policiers et militaires colombiens, tous
séquestrés par les terroristes des FARC pendant plusieurs années.
"Je suis très heureux de cette libération. Je crois que c'est
une conquête des droits de l'homme, des citoyens, quelque chose d'extraordinaire...
On doit commencer à comprendre que la façon la plus facile
d'arriver au pouvoir est de se présenter aux élections" déclarait
à Bogota le président Lula.
Cette invitation aux FARC à abandonner la lutte armée pour
la voie démocratique est depuis plusieurs semaines lancée à
la guérilla par quasi tous les leaders de la gauche latino-américaine,
y compris les socialistes radicaux Hugo Chavez (Venezuela), Evo Morales (Bolivie)
et Rafael Correa (Equateur).
La célèbre vedette colombienne
Shakira, qui chanta l'hymne national aux côtés des trois présidents
réunis à Leticia, ajouta cet argument à l'adresse des
FARC: "Libérez-vous. Vous vous séquestrez vous-mêmes
dans les ténèbres de la jungle."
Même son de cloche à Paris. "Voyez la main tendue par le président
Uribe, comprenez que c'est terminé les bains de sang, le moment est
venu d'abandonner les fusils et de les remplacer par des roses" a lancé
dimanche aux FARC Ingrid Betancourt.
Entourée sur l'esplanade du Trocadéro par dix mille personnes,
dont peut-être une majorité de Colombiens, elle remercia encore le président
Alvaro Uribe pour sa libération et insista en s'adressant directement au nouveau chef
suprême des FARC, Alfonso Cano: "Regarde cette Colombie, accepte la main tendue par le
président Uribe, déposez les armes et relâchez les otages".
La foule scanda maintes fois "Uribe! Uribe!". "Merci Uribe" disaient des pancartes
en français. Les grands médias de l'Hexagone ont reconnu que
des millions de Colombiens se sont mobilisés pour la liberté,
contre les enlèvements et contre les FARC.
En février, les mêmes médias firent la fine bouche, réduisant
parfois à quelques milliers de personnes une mobilisation similaire.
Ingrid Betancourt était alors encore séquestrée. Le
président vénézuélien Hugo Chavez était
présenté comme la clef de sa libération et certains
n'hésitaient pas à dépeindre Alvaro Uribe comme le responsable
du drame des otages vu son passé supposé de "fasciste paramilitaire".
Pareille espèce de supercherie, téléguidée par le Quai d'Orsay,
les comités Betancourt et la famille de la célèbre ex-otage,
conduira-t-elle un jour à désigner le symbole de la nouvelle
démocratie espagnole, l'actuel roi Juan Carlos, comme l'un des responsables
des centaines de milliers de morts imputables au soulèvement
militaire et à la dictature de Franco, aux principes de laquelle le
souverain, alors jeune prince, jura solennellement fidélité?
Compte tenu de circonstances héritées et souvent non souhaitées,
Juan Carlos Ier et Alvaro Uribe, qui a démonté avec d'inévitables
aléas les grandes structures du paramilitarisme colombien, ont chacun,
dans leur pays respectif, plus contribué à la démocratie
que la plupart de leurs adversaires.
Sur un flanc de la tribune d'où parlait Ingrid Betancourt, au Trocadéro,
une banderole clamant "Accord humanitaire maintenant" prouvait qu'à
Paris on reste à la traîne au moment d'évaluer la situation
en Colombie. Si Alvaro Uribe tend à nouveau aujourd'hui les bras aux
FARC, c'est à l'évidence, sans besoin de le dire, pour que
cette guérilla négocie une défaite plus ou moins honorable
et les termes de sa reddition. Un "accord humanitaire", qui risquerait d'oxygéner
politiquement les FARC pour ne libérer qu'une poignée seulement d'otages parmi
des centaines ou des milliers d'autres, n'est plus à l'ordre du jour à Bogota.
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