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Un non des urnes au traité avec Washington serait une première mondiale
Costa Rica - référendum : le non au libre-échange avec les Etats-Unis est favori
SAN JOSÉ, vendredi 5 octobre 2007 (LatinReporters.com)
- Le premier référendum de l'histoire du Costa Rica, dimanche
7 octobre, pourrait en faire le premier pays de la planète à
refuser par les urnes un traité de libre-échange avec les Etats-Unis.
Le dernier sondage prédit le triomphe du non. Ce résultat aurait
un grand impact en Amérique latine.
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Des dizaines de milliers d'opposants au traité de libre-échange avec les Etats-Unis manifestaient le 30 septembre 2007 à San José, capitale du Costa Rica - Photo Adrian Carranza - |
L'axe "bolivarien" Venezuela - Cuba - Bolivie - Equateur serait moralement renforcé.
La Colombie, le Pérou et le Panama, pays dans l'attente de la ratification
de leur propre accord de libre-échange avec Washington, risqueraient
d'affronter une hostilité croissante au sein de leur opinion publique.
Ceux liés à Washington par un traité de libre commerce
en vigueur - Mexicains, Chiliens, Centraméricains- éviteraient
difficilement la naissance ou la relance d'un débat contradictoire.
Au Costa Rica, le rejet du traité serait aussi une gifle au prestige
du président social-démocrate Oscar Arias, Prix Nobel de la
Paix 1987. Le chef de l'Etat est déjà éclaboussé
par le scandale né d'une "campagne de la peur" qui contrarie la ratification
du traité.
Plus de 2,6 millions d'électeurs, pour une population globale de
4,2 millions de Costaricains, sont appelés dimanche à répondre
oui ou non à la question "Approuvez-vous le Traité de libre
commerce (TLC) République dominicaine, Centramérique / Etats-Unis?".
Ce TLC conclu en 2004 est connu aussi sous l'appellation CAFTA (Central American Free Trade
Agreement). Il régit le libre-échange entre, d'une part, les
Etats-Unis et, d'autre part, la République dominicaine et 5 pays d'Amérique
centrale (Costa Rica, Salvador, Guatemala, Honduras et Nicaragua). Seul le
Costa Rica, pays le plus développé de cette région,
ne l'a pas encore ratifié.
Publié par le quotidien costaricain La Nacion du 4 octobre, date
limite autorisée pour la diffusion de sondages, celui de la société
Unimer crédite le non de 55% des intentions de vote, contre 43% au
oui. La participation est estimée à 62%, soit très supérieure
à la barre légale de 40% à partir de laquelle le résultat
du référendum aura force contraignante.
Le 24 septembre, l'avant-dernier sondage d'Unimer donnait encore le oui vainqueur
par 49% contre 46% au non. Dans les prévisions diffusées en
août, le oui écrasait le non par 56% contre 36%.
Le retournement spectaculaire des intentions de vote a suivi les révélations
de l'hebdomadaire Semanario Universidad. Il a publié le texte d'un
mémorandum envoyé le 29 juillet dernier au président
Arias par le vice-président Kevin Casas et le député
Fernando Sanchez, élu du Parti de libération nationale (PLN)
d'Oscar Arias.
Pour mener la campagne référendaire en faveur du oui au TLC,
MM. Casas et Sanchez prônaient dans le document "une campagne de la
peur" soulignant les conséquences négatives d'une victoire
du non. Ils recommandaient notamment d'assimiler les adversaires du traité
à des alliés du Cubain Fidel Castro, du Vénézuélien
Hugo Chavez et du Nicaraguayen Daniel Ortega, trois présidents souvent
perçus comme des dictateurs effectifs ou potentiels. Le mémorandum
proposait aussi de faire pression sur des maires en les menaçant de
réduire leurs ressources budgétaires en cas de victoire du
non dans leur municipalité.
Le tollé national soulevé par les révélations
de Semanario Universidad a conduit Kevin Casas à démissionner
de la vice-présidence du Costa Rica et du poste de ministre de la
Planification qu'il assumait aussi. Le député Fernando Sanchez
a renoncé, lui, à la présidence de deux commissions
parlementaires. Semanario Universidad affirme que "le mémorandum a
été appliqué point par point". Le président Oscar
Arias le nie.
La ratification du Traité de libre commerce fut déjà
l'enjeu central des élections générales du 5 février
2006. Libre-échangiste convaincu et donc partisan du TLC, Oscar Arias
retrouvait l'an dernier avec 40,9% des suffrages le fauteuil présidentiel
qu'il occupa de 1986 à 1990. Mais son parti, le PLN (membre de l'Internationale
socialiste), n'obtint que 25 des 57 députés de l'Assemblée
législative (Parlement monocaméral). Trop peu pour assurer
une ratification parlementaire.
Au scrutin présidentiel, Oscar Arias devança d'à peine
18.169 voix l'un de ses anciens ministres, Otton Solis (39,8%), dissident
du PLN et fondateur du Parti d'action citoyenne (PAC), devenu la 2e force
parlementaire avec 17 députés. Otton Solis veut renégocier
le Traité de libre commerce. Il lui reproche d'ouvrir la voie à
la privatisation de monopoles publics (banques, assurances, électricité,
télécommunications) et de faire la part trop belle aux exportations
agricoles subventionnées des Etats-Unis.
Depuis son investiture, le président Arias est quasi monopolisé
par la ratification du traité. Les partisans du TLC - gouvernement, patronat, médias influents- insistent sur la nécessité de l'accès
préférentiel au marché des Etats-Unis pour développer
l'emploi, pour maintenir la capacité concurrentielle du Costa Rica
en Amérique centrale et pour renforcer sa position dans la négociation
d'un accord d'association que les pays centraméricains ont ouvert
l'été dernier avec l'Union européenne.
Du côté de l'opposition, le PAC d'Otton Solis est renforcé
par les syndicats, des collectifs d'agriculteurs et d'universitaires, des
écologistes, des autorités académiques, des dirigeants
sociaux-chrétiens et même quelques personnalités du PLN
présidentiel, qui doutent soudain du "néolibéralisme",
ainsi que des prêtres défiant la neutralité épiscopale.
Un communiqué soutenant le non a été signé par
92 des 800 prêtres catholiques du Costa Rica.
Dans ce contexte alourdi par une guérilla juridique parlementaire
et malgré la possibilité théorique de bénéficier
de l'appui d'élus de droite, le chef de l'Etat, poussé par le Tribunal suprême électoral, a opté pour le référendum. Résoudre dans un sens ou l'autre le problème posé par le TLC est d'autant plus nécessaire que le blocage
actuel paralyse d'autres initiatives, notamment la réforme fiscale
et celle sur les concessions.
Les manifestations contre le TLC ont secoué un Costa Rica longtemps si paisible
qu'on l'appelait parfois, vu aussi sa relative prospérité,
la Suisse de l'Amérique centrale. Le 30 septembre, le Mouvement patriotique
anti-TLC clôturait sa campagne à San José, la capitale,
emplissant le Paseo Colon de dizaines de milliers de manifestants, 150.000
selon les organisateurs, 30.000 selon les autorités.
Cette foule inédite ovationna notamment Mgr Ignacio Trejos, évêque émérite
de San Isidro del General (ville du sud), après un discours dans lequel
il présenta le débat actuel comme "une lutte entre le bien
et le mal, entre ceux qui vendent la patrie et ceux qui la défendent,
entre Dieu et Satan"...
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