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Espagne - Médiocres : pas d'unité pour manifester contre ETA
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Archives - Photo AVT |
par Jean Chalvidant (*)
www.chalvidant.info
Samedi 13 janvier 2007 (LatinReporters.com) - Après le coup de tonnerre
de la bombe de l’aéroport de Barajas, mettant de fait fin au mal nommé
processus de paix, on pouvait s’attendre à une vague de fond populaire,
condamnant tout à la fois l’attentat et ETA. Car sur ce point, 98% des Espagnols s’accordent.
D’où vient alors le malaise?
Réponse : de cette satanée politique politicienne qui fait
que chaque organisation, chaque parti, chaque syndicat, entend défiler
pour son propre compte, avec des arrières pensées politiques
et récupératrices en tête.
On est bien loin de l’émouvante unanimité ayant présidé
à la mort du jeune conseiller d’Ermua, Miguel Ángel Blanco,
assassiné par la bande en juillet 1997, qui avait vu 6 millions d’Espagnols
défiler dans toutes les capitales d’Espagne. De l’eau a coulé
sous les ponts, les deux Espagne regrettées par le poète Antonio
Machado s’affrontent chaque jour davantage. Et le personnel politique de
la Péninsule ne se montre guère à la hauteur de l’événement,
qu’il soit de droite ou de gauche.
C’est ainsi que samedi nous devions assister à Madrid à l’une des
pires cacophonies qui soit : d’un côté les syndicats Commissions
ouvrières (communistes ou ce qu’il en reste) et Union générale des travailleurs
(socialiste), flanqués d’une association d’Equatoriens (nationalité d’origine
des deux victimes). On ne voit guère en quoi les intérêts
des travailleurs sont concernés par cette marche. Avec derrière,
naturellement, tout le poids du PSOE [Parti socialiste ouvrier espagnol
de José Luis Rodriguez Zapatero; ndlr] soucieux de récupérer
une once de crédibilité.
Et c’est là où le bât blesse. Le PP [Parti Populaire,
opposition conservatrice], qui a ces derniers mois rassemblé plusieurs
millions de manifestants dans les rues, a décidé de ne pas se joindre au
défilé, car selon lui le gouvernement n’a pas cherché le consensus, repoussant
ses suggestions et générant la dissension et la division. Pour
lui, le défilé du 13 janvier n’est qu’un acte de soutien à
la négociation avec les terroristes. Pire, il a demandé formellement
que soient annulées les manifestations. Comme quoi il n’y a pas qu’en
France que la droite soit la plus bête du monde.
Ce n'est guère mieux à Bilbao à celle organisée par
le président basque, Ibarretxe. Dans une première étape,
on apprenait que Batasuna [parti hors-la-loi, vitrine politique de l'ETA]
y participerait, d’où embarras du lehendakari. C’est pourquoi il a
d’urgence fait changer le slogan mobilisateur. Exit le « Pour la paix
et le dialogue », devenu « Exigeons d’ETA la fin de la
violence. Pour la paix et le dialogue ». Ce qui a tout changé, les séparatistes
étant ainsi invités à rester à la maison. L’œucuménisme
est plus évident en Navarre où la droite (Unión del
Pueblo Navarro) devait défiler avec le Parti socialiste local et le PNV
[Parti nationaliste basque].
Voilà donc la manifestation la moins unitaire contre
ETA, sans le PP, sans Gallardón, le maire de la capitale, sans l’Association
des victimes du terrorisme, sans le Forum d’Ermua, sans les associations
des escortes, sans les syndicats de la Garde civile, sans les autres associations
équatoriennes type FEM (Fédération des Equatoriens de Madrid), qui s’est
rangée derrière le chef du PP, Mariano Rajoy. Pour des raisons sémantiques ou
électoralistes. L’Espagne n’a décidément pas la classe politique qu’elle
mérite.
(*) Docteur en Civilisation espagnole, Jean Chalvidant est le spécialiste de l’Espagne et de
l’Amérique latine au MCC, le département de recherche sur les Menaces Criminelles
Contemporaines (Institut de criminologie/Université Paris II Panthéon-Assas).
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