"Ingrid est en danger de mort imminente" Colombie-Betancourt: nouvel appel de Sarkozy à Marulanda, chef de la guérilla des FARC
PARIS, mardi 1er avril 2008 (LatinReporters.com) -
"Libérez Ingrid Betancourt et ceux des otages qui sont les plus affaiblis! ... Ne
laissez pas perdre l'occasion qui se présente. Ce serait une
faute politique grave en plus d'une tragédie humanitaire. Ce serait
un crime, vous seriez responsable de la mort d'une femme" s'exclame le
président français Nicolas Sarkozy dans un message, radiotélévisé
le 1er avril, adressé à Manuel Marulanda, chef suprême
de la guérilla marxiste des FARC (Forces armées révolutionnaires
de Colombie). Cette guérilla séquestre Ingrid Betancourt depuis
le 23 février 2002.
Le message télévisé du président français Nicolas Sarkozy à Manuel Marulanda, chef de la guérilla colombienne des FARC - 2min 44sec
Dans un premier message radiotélévisé à Manuel
Marulanda, le 6 décembre 2007, le président Sarkozy soulignait
"la lourde responsabilité" du leader rebelle. "Aucune lutte
n'a de sens sans le respect de la dignité de l'être humain"
disait alors le chef de l'Etat.
Ce message demeura sans suite en ce qui concerne Ingrid Betancourt. Les deux
libérations unilatérales d'un total de six otages des FARC
depuis janvier 2008 répondaient peut-être partiellement à
l'appel du 6 décembre, mais elles s'inscrivaient surtout dans la coopération
politico-médiatique entre les FARC et leur principal allié,
le président vénézuélien Hugo Chavez. Les otages
ne furent en effet libérés qu'à la condition d'être
remis à des émissaires du président Chavez, qui organisa
leur transfert immédiat à Caracas.
M. Sarkozy interpellait une nouvelle fois Manuel Marulanda le 5 mars dernier,
dans une interview accordée à la chaîne colombienne RCN,
le plaçant une fois de plus devant ses responsabilités, surtout
quant à "l'assassinat de sang-froid" que constituerait, selon
le président français, le décès en captivité
d'Ingrid Betancourt, très fragilisée physiquement.
Dans un communiqué daté du 20 mars et publié le 31 mars
par l'ABP (Agencia Bolivariana de Prensa, proche des FARC), l'un des sept
principaux commandants de la guérilla, Ivan Marquez, cite Manuel Marulanda
pour affirmer que "l'échange de prisonniers et la paix ont été
gravement compromis" par la mort de Raul Reyes, nº2 des FARC tué
le 1er mars au nord de l'Equateur lors d'une attaque de l'armée colombienne.
Ivan Marquez précise que la mort de Raul Reyes a empêché
une "rencontre avec la délégation française pour
explorer la libération d'Ingrid [Betancourt]". Selon de nombreux analystes, les
FARC ne prétendent libérer la Franco-Colombienne et d'autres otages
dits politiques qu'en échange non seulement de la libération de guérilleros
emprisonnés, mais aussi et surtout de concessions politiques et territoriales
exigées du président colombien Alvaro Uribe.
Souffrant selon des sources concordantes d'hépatite B, de leishmaniose
et peut-être aussi de paludisme, Ingrid Betancourt aurait été
vue le dimanche 23 mars par un paysan de la localité d'El Retorno,
dans le département du Guaviare (sud-est de la Colombie, à
450 km de Bogota). "Elle était très mal, très triste,
comme si elle n'avait plus envie de vivre. Elle était très
pâle, très maigre, et semblait refuser de manger" aurait
confié ce paysan à des responsables locaux cités par
les médias.
Citant pour sa part les services de renseignement de l'armée, la radio
privée colombienne Caracol confirmait lundi qu'Ingrid Betancourt est
vivante, mais dans un état grave, "n'acceptant pas les médicaments
ni la nourriture que lui donnent les guérilleros".
MESSAGE RADIOTÉLÉVISÉ DU PRÉSIDENT DE
LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
À MANUEL MARULANDA, CHEF DES FARC
(Texte intégral - Paris, 1er avril 2008)
"J'adresse ce nouveau message à Manuel Marulanda et aux commandants
des Forces Armées Révolutionnaires de Colombie.
Les dernières informations qui nous parviennent au sujet d'Ingrid
Betancourt et les témoignages d'anciens otages sont profondément
alarmants. Ils confirment que l'état de santé d'Ingrid s'est
détérioré si gravement que sa vie est désormais
menacée. Ingrid est en danger de mort imminente. Elle n'a plus la
force de résister à une captivité interminable qui s'enfonce dans
la tragédie.
Devant cette situation, Monsieur Marulanda, vous devez comprendre l'attente
de la France et de la communauté internationale.
Nous constatons que les libérations intervenues depuis le début
de l'année ont fait renaître un espoir. Elles ont démontré
qu'il était possible de débloquer la situation. Il faut maintenant
tirer parti de cette dynamique.
J'attends donc de vous la marque d'humanité sans laquelle tout s'enlisera
de nouveau. Puisqu'il suffit désormais d'une décision
de votre part pour sauver une femme de la mort et faire vivre l'espoir pour
tous ceux qui restent détenus : prenez cette décision, relâchez
Ingrid Betancourt !
Par cet acte déclencheur, vous répondrez à l'insupportable
attente des familles et à la clameur de la communauté internationale
unanime. Vous rendrez compréhensible votre discours. Vous dessinerez
enfin des voies d'avenir. Vous ouvrirez des perspectives pour la paix.
Alors, vous qui dirigez les FARC, vous avez, maintenant, un rendez-vous avec
l'Histoire : ne le manquez pas ! Libérez Ingrid Betancourt et ceux
des otages qui sont les plus affaiblis ! La France est, et restera, mobilisée
pour un accord humanitaire. Ne laissez pas perdre l'occasion qui se
présente. Ce serait une faute politique grave en plus d'une tragédie
humanitaire. Ce serait un crime, vous seriez responsable de la mort d'une
femme.
La France n'attend qu'un signal de votre part pour organiser aussitôt,
en liaison avec les autorités compétentes, une mission humanitaire
pour aider à la prise en charge d'Ingrid et de ses codétenus
les plus affaiblis.
Nous n'avons pas le droit de rester sans rien faire. C'est maintenant et
c'est tout de suite. Il en va de la vie d'une femme. Chacun est désormais
placé devant ses responsabilités. Vous avez les vôtres,
assumez-les."
DERNIÈRE HEURE Pour accéder aux FARC et à Ingrid Betancourt Mission humanitaire française en Colombie, qui suspendra des opérations militaires
PARIS / BOGOTA, mardi 1er avril 2008 (LatinReporters)
Communiqué de la présidence de la République française
diffusé à 20h38:
"Le Président de la République [Nicolas Sarkozy] a pris l'initiative
d'appeler le Président colombien M. Alvaro Uribe ce soir.
Il lui a fait part de son extrême inquiétude devant les informations
relatives à l'état de santé de Mme Ingrid Betancourt
qui apparaît aujourd'hui en danger de mort imminente.
Il lui a fait part de son intention de dépêcher sans délai
une mission humanitaire sur place pour prendre contact avec les FARC et obtenir
accès à notre compatriote. Il a demandé au Président
colombien de suspendre toute forme d'opérations militaires pour assurer
la sécurité et le succès de cette mission.
Fort des assurances reçues, le Président de la République
réitère son appel aux FARC à saisir cette occasion unique
pour relâcher Mme Ingrid Betancourt."
Précisions à Bogota du président colombien Alvaro
Uribe:
"...Dès notre réunion à Paris avec le président
Sarkozy [le 21 janvier 2008; ndlr], nous lui avions exprimé toute
notre volonté de donner des facilités pour qu'une mission médicale
internationale prenne contact avec les séquestrés [otages des
FARC; ndlr] et s'occupe d'eux afin d'éviter que leur santé
ne se détériore davantage...
Lorsque nos autorités compétentes seront informées
par la mission humanitaire [française, accompagnée de la Croix-Rouge
internationale; ndlr] des coordonnées de l'endroit où elle
doit se rendre pour protéger la santé faiblissante des séquestrés,
d'Ingrid Betancourt et des autres otages, nous suspendrons en cet endroit
les actions militaires pour faciliter le travail de cette mission humanitaire".
Rappel
Le président colombien Alvaro Uribe a réitéré
la semaine dernière sa promesse d'octroyer une forte récompense
financière aux guérilleros qui trahiraient leurs chefs et déserteraient
en emmenant leurs otages vers la liberté. Il a aussi, par décret,
autorisé l'élargissement des rebelles des FARC emprisonnés,
même ceux condamnés pour crimes contre l'humanité, à
condition que la guérilla libère un nombre indéfini
d'otages, voire la seule Ingrid Betancourt.
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