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Le chef de la diplomatie française en Colombie, en Equateur et au Venezuela
Colombie-Betancourt-Kouchner: rançon politique toujours exigée par les FARC
BOGOTA, mardi 29 avril 2008 (LatinReporters.com) -
Si la libération de la quasi totalité des quelque 800 hommes, femmes
et enfants séquestrés par les FARC dépend du paiement
d'une forte rançon financière, c'est une rançon politique
que cette guérilla marxiste continue à exiger à la fois
de la Colombie et de la France avant de négocier la libération
d'Ingrid Betancourt et de plus de 30 autres otages. Aussi le pessimisme domine-t-il
la mission en Colombie, en Equateur et au Venezuela du ministre français
des Affaires étrangères, Bernard Kouchner.
Le mutisme officiel à suivi l'entretien, le 28 avril à Bogota,
entre M. Kouchner et le président colombien Alvaro Uribe. On sait
que le ministre français a remis à son interlocuteur une lettre
du président Nicolas Sarkozy pouvant suggérer une nouvelle
approche du drame des otages. Ecarté par Alvaro Uribe, le retour du
président vénézuélien Hugo Chavez dans une médiation
avec les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie)
qu'avaliserait Bogota est souhaité par Paris.
La Colombie, qui tente d'ouvrir son propre canal de communication avec la
guérilla, n'accepte que l'Eglise et trois pays facilitateurs
-France, Suisse, Espagne- comme médiateurs avec les insurgés.
Au mieux, peut-être M. Kouchner a-t-il obtenu de Bogota que la France
puisse accentuer son autonomie dans ses tentatives de médiation en
vue de la libération des otages.
"La France persiste" titre le 29 avril l'agence ANNCOL, haut-parleur officieux
des FARC. Et de renouveler en ces termes la demande de rançon politique déjà
adressée précédemment au président Sarkozy: "La
France dispose de moyens pour obtenir la libération des détenus [euphémisme pour otages]:
retirer les FARC de sa liste d'organisations terroristes et les reconnaître comme organisation belligérante. [NDLR - La
liste est celle de l'Union européenne, soumise au consensus des 27
pays membres et non à la seule volonté de Paris]. En outre,
elle [la France] prend le 1er juillet prochain la présidence
de l'Union européenne, un cadre approprié pour ratifier avec les 27 autres
communautaires [sic] la volonté de l'Europe d'aplanir
les chemins menant à la paix en Colombie".
"Que la France oublie Bogota. Il n'y a pas de temps à perdre. Quito et Caracas sont ses
meilleurs alliées" poursuit ANNCOL, misant ainsi sur la rencontre, le 29 avril, de Bernard
Kouchner avec le président équatorien Rafael Correa, suivie le lendemain
d'une entrevue avec le président vénézuélien
Hugo Chavez.
Le 11 janvier dernier, à la tribune de l'Assemblée nationale
du Venezuela, le président Chavez priait déjà l'Union
européenne de retirer les guérillas colombiennes de sa liste
d'organisations terroristes. Hugo Chavez clamait alors qu'il faut "reconnaître
les Forces armées révolutionnaires de Colombie et l'Armée
de libération nationale de Colombie. Ce sont des forces insurgées
qui ont un projet politique, qui ont un projet bolivarien qui, ici [au
Venezuela], est respecté".
Tant le président Chavez que son allié équatorien Rafael
Correa observent toutefois à l'égard des FARC une distance
prudente, fût-elle de façade et provisoire, depuis la révélation
de leurs liens politiques et financiers avec la guérilla. Ces liens
sont consignés dans les trois ordinateurs portables de celui qui fut
le nº2 des FARC, Raul Reyes, abattu lors du raid mené le 1er
mars par l'armée colombienne contre un camp des rebelles au nord de
l'Equateur.
Quant à la rançon politique exigée depuis longtemps
de la Colombie et sans cesse refusée par le président Uribe,
les FARC la maintiennent dans leurs derniers messages: démilitarisation
pendant 45 jours des municipalités de Florida et Pradera pour y négocier
l'échange dit humanitaire de prisonniers.
Florida et Pradera, dans le sud-ouest colombien, s'étendent sur 800 km². Elles comptent ensemble plus de 110.000 habitants et abritent des postes de l'armée et de
la police. La démilitarisation envisagée par les FARC étant
unilatérale, car ne concernant que policiers et militaires à
l'exclusion des guérilleros, ce territoire et sa population se retrouveraient
à la merci des seuls insurgés.
Florida et Pradera ne sont qu'à 30 km de Cali, troisième ville
de Colombie avec plus de deux millions d'habitants. Laisser les FARC concentrer
des forces pendant 45 jours au portes de cette ville risque d'en faire une
cible fragilisée. Le port le plus important de la côte pacifique
de la Colombie, Buenaventura, n'est qu'à 145 km de Cali. Il traite
60% des exportations colombiennes et est un poumon essentiel de l'approvisionnement
de Bogota.
En outre, les autorités colombiennes doutent que Florida et Pradera
soient évacuées par les FARC après d'éventuelles
négociations. Car, en maintenant le contrôle absolu d'un territoire,
la guérilla remplirait la condition essentielle pouvant mener à
sa reconnaissance internationale comme force belligérante. A ce statut
sont liées des prérogatives politiques et diplomatiques.
Dans ce contexte, la France, qui a élevé au rang d'affaire
d'Etat la libération de la "Franco-Colombienne" Ingrid Betancourt,
devra tôt ou tard reconnaître publiquement que le drame des otages
est utilisé comme levier d'ambitions géopolitiques visant à
l'expansion en Amérique latine de l'idéologie "bolivarienne"
dont se réclament tant les FARC que le Venezuela de Hugo Chavez. Le
reconnaître ne signifierait pas baisser les bras à l'égard
des séquestrés, mais réduirait le sentimentalisme improductif
qui est devenu l'allié objectif des preneurs d'otages.
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